Analyse de "Complainte d'un autre dimanche" de Jules Laforgue

Analyse de "Complainte d'un autre dimanche" de Jules Laforgue

Introduction

 

Jules Laforgue, poète français né en 1860 et décédé prématurément en 1887, a marqué la littérature par son œuvre empreinte de mélancolie et de modernité. Son recueil "Les Complaintes", publié en 1885, se distingue particulièrement, et parmi ses poèmes, "Complainte d'un autre dimanche" fait suite au poème « Complainte d'un certain dimanche ». Ce poème reflète non seulement le style unique de Laforgue mais aussi l'essence de son expérience de vie brève et intense.

 

I. Spectacle sans beauté et morne

 

Le poème débute par une représentation visuelle morne et dénuée de beauté. Laforgue utilise deux cadres emboîtés, celui de la fenêtre et de la jalousie, pour créer une construction en abîme qui suggère un sentiment d’emprisonnement. Cette sensation est renforcée par l'image d'une fenêtre encombrée par une guitare, évoquant un espace réduit et confiné.

 

Le spectacle décrit est également marqué par sa pauvreté visuelle : un soleil couchant, un coin de buanderie aux tuiles sales, un hôpital, cinq arbres comptés de manière obsessionnelle révélant un profond ennui. Les objets décrits sont sales, immobiles, vieux, oubliés, évoquant une atmosphère automnale et une coloration blanche légèrement souillée.

 

Dans cette première partie, Laforgue met en scène un environnement inchangé, où les seuls éléments de vie sont les rafales de vent. Cependant, ces cinq arbres constants symbolisent un paysage immuable et monotone.

 

II. Un monde en décomposition

 

Laforgue poursuit avec l'idée d'un monde en décomposition. Cette décomposition se manifeste lentement, comme le montrent les jalousies hors d'usage et les tuiles salies par le temps. Le détail des glycines, réduites à de simples tiges sans feuilles, évoque une usure profonde, une agonie naturelle.

 

En parallèle, la décomposition peut être violente. Les rafales de vent, désordonnées et impitoyables, semblent s'abattre sur le paysage, illustrant une sorte de méchanceté gratuite. Le rythme du poème devient saccadé, reflétant cette violence, cette lutte contre les éléments.

 

III. L’état d’âme du poète

 

La première strophe révèle un paysage typique du spleen chez Laforgue, où le mois d'octobre et le vent symbolisent la fragilité, l'agression et la mort. Le poète, confronté à sa propre maladie et à sa souffrance, exprime un ennui mortel et un profond désarroi.

 

Ce désarroi se traduit par un dédoublement de personnalité, où le "je" exprime la réalité de la souffrance et le "tu" tente de prendre du recul. Cette dualité reflète la lenteur de la vie et une impatience face à la mort, ainsi qu'un dégoût de soi.

 

Conclusion

 

Dans "Complainte d’un autre dimanche", Laforgue exprime son spleen de manière indirecte, à travers la description d'un paysage en décomposition, rempli de laideur et de disharmonie. Ce poème incarne l'esprit caractéristique de la fin de siècle, avec un rythme et des sonorités lourdes, presque germaniques, reflétant le désespoir et la complexité émotionnelle du poète.

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