Juste la fin du monde de Lagarce, analyse linéaire de l'épilogue

Juste la fin du monde de Jean-Luc Lagarce, Analyse linéaire de l'épilogue

Introduction

Préparation au bac de français avec Jean-Luc Lagarce et son œuvre, "Juste la fin du monde". Cette pièce est un témoignage poignant sur les crises personnelles et familiales. Dans cette analyse, nous nous concentrerons sur l'épilogue, le dernier monologue de Louis. Il s'agit d'un moment poignant qui survient après le départ de Louis, sans avoir dit ce qu'il avait à dire, quelques mois plus tard. Louis semble parler depuis sa tombe (prosopopée), exprimant le regret d'un cri estival qu'il n'a pas poussé.

 

I - (v 1-5) La mort de Louis 

II - (v 6-23) Le souvenir 

III - (v 24-35) Le cri silencieux, la parole impossible 

 

Problématique: 

En quoi cet épilogue relève-t-il de la parrhésie testamentaire ?  

I - La mort de Louis

La section de l'épilogue débute par une prosopopée. La brièveté des phrases apporte une touche dramatique à la scène, rendant les actions consécutives d'autant plus tragiques. La mort est évoquée dès les premiers vers (par euphémisme), et une gradation des épanorthoses souligne son imminence.

II - Le souvenir

Louis revisite un souvenir qu'il ressent comme profondément personnel. L’usage de l'adverbe “encore” indique qu'il peut soit raconter encore une fois, soit narrer avant de s'éteindre définitivement. De manière similaire, la syllepse présente peut signifier la fin de la parole, la fin de la vie et également la conclusion de la pièce. Ce souvenir fait écho de manière troublante avec l'expérience réelle que Lagarce relate dans son journal. Présenté de manière prosaïque sans lyrisme, le souvenir est ancré dans un cadre spatio-temporel assez précis. C'est dans cette précision que le dramaturge exerce son art.

 

L'antithèse utilisée symbolise le conflit entre la détermination inébranlable de Louis et son indécision. En effet, tout au long de la pièce, Louis se perd dans les méandres de la parole, dans le labyrinthe des mots. Il semble ici se libérer de cette entrave car le chemin de fer symbolise sa volonté de résister, de se libérer de la tradition familiale. La voie ferrée représente également le destin inéluctable. Louis précise que ce chemin est plus court, créant ainsi une analogie avec sa vie qui s'achève prématurément. Les sentiments exprimés, tels que la sensation d’être perdu, d’avoir peur, d’être en danger, donnent des indices sur l'état d'esprit de Louis. D'ailleurs, ce souvenir est lié à la maison où il réside et qu'il cherche à rejoindre par le chemin le plus court.

 

Dans ce souvenir, un viaduc immense surgit, comme un pont symbolique entre deux mondes, une image majestueuse et impressionnante. Louis, en contraste, apparaît fragile sur ce pont et symboliquement il est à égale distance du ciel et de la Terre (à égale distance du monde des morts et du monde des vivants). Il est une image d'élévation, de libération, opposée à la chute, à l'échec. Louis se situe précisément à mi-chemin entre la possibilité d'une libération et l'échec de cette libération, illustrant parfaitement les crises personnelles et familiales dans le cadre du bac de français.

III - Le cri silencieux, la parole impossible

Après avoir ancré le souvenir dans son cadre spatio-temporel, Louis revient à l'essence de son discours en mettant l'accent sur un épisode particulier. Il fait mention d'un cri de bonheur qu'il aurait aimé pousser. Ce cri est une réminiscence de l'aveu de Louis dans la pièce. L'abondance d'adjectifs, les rythmes binaires et le long verbe au conditionnel présent prolongent ce cri tant souhaité, le rendant presque audible, le cri étant l'essence de la parole.

 

Cette éveil de la sensation auditive du lecteur met en relief l'image du bonheur qui lui est associée. Pour Louis, il s'agirait alors de proclamer au monde son bonheur de vivre, tel un cadeau, une interprétation soulignée par la métaphore du verbe "offrir". Cette expression libératrice pourrait être associée à une colère longtemps contenue, désormais révélée. La domination entrevue à travers l'image du viaduc est prolongée par le cri qui résonne dans toute la vallée: une mise en abyme du théâtre (la vallée représentant le public, Louis l'acteur, le viaduc la scène et la lune le projecteur). Cette mise en abyme, emblématique de la crise personnelle et familiale abordée dans le bac de français, enrichit la profondeur du texte.

 

Cependant, Louis demeure silencieux devant ses proches, incapable d'exprimer ce cri latent en lui, renonçant ainsi au bonheur. Le constat fait grâce au polyptote résonne comme un verdict inévitable (trop tard). Tout comme à la fin de la pièce familiale, Louis reprend sa marche silencieuse et solitaire sans avoir prononcé un mot (préfixe "re"). L'absence de cri est révélée par l'adverbe "seul". La terre, le sol, la chute l'emportent (gravier), et non l'élévation, la libération, le cri.

Conclusion

L'épilogue de "Juste la fin du monde" est un exemple puissant de la façon dont la crise personnelle et la crise familiale peuvent se manifester au théâtre. Les étudiants préparant le bac de français peuvent tirer des leçons précieuses de l'exploration de ces thèmes à travers l'œuvre de Lagarce. En lien avec l'épilogue, le prologue de l'œuvre peut également être analysé pour comprendre la relation entre les deux et comment l'épilogue répond au prologue. De plus, le journal de Lagarce offre une perspective autobiographique précieuse, offrant un aperçu de la crise personnelle vécue par l'auteur lui-même.

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