Résumé détaillé de "Vers la paix perpétuelle" de Kant : L'idée d'une harmonie internationale
Vers la paix perpétuelle (Zum ewigen Frieden), écrit par Emmanuel Kant en 1795, est un essai philosophique qui propose un plan de paix durable entre les États, en réponse aux guerres incessantes de son époque. Dans ce texte, Kant explore les conditions et les principes nécessaires pour établir une paix perpétuelle à l'échelle mondiale. Il y développe une vision utopique mais réaliste, où les nations peuvent coexister pacifiquement sous un cadre juridique et éthique. Kant imagine un monde où la guerre ne serait plus une option pour résoudre les conflits.
L’ouvrage est divisé en plusieurs parties, avec des propositions préliminaires et définitives pour atteindre la paix perpétuelle, suivies d’articles supplémentaires qui renforcent la réflexion kantienne.
1. Préambule : Une paix temporaire ou une paix perpétuelle ?
Kant commence son essai par une distinction entre la paix temporaire et la paix perpétuelle. Selon lui, les traités de paix que les États signent après une guerre ne sont souvent que des suspensions temporaires des hostilités. Ils ne garantissent pas une paix durable car ils ne s'attaquent pas aux causes profondes des conflits. Kant insiste sur le fait qu'une paix véritable doit être basée sur des principes universels et non sur des accords éphémères. Le but de son essai est de proposer ces principes.
2. Les six articles préliminaires pour la paix perpétuelle
Kant énonce six articles préliminaires qui sont des conditions nécessaires pour éviter la guerre entre les nations :
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Article 1 : "Aucun traité de paix ne doit être considéré comme tel s'il est fait avec des réserves secrètes." Pour Kant, un traité de paix qui inclut des arrière-pensées ou des intentions cachées ne peut pas être une véritable paix. Les accords doivent être sincères et transparents.
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Article 2 : "Aucun État indépendant ne doit pouvoir être acquis par un autre État, par héritage, échange, achat ou donation." Kant défend ici la souveraineté des États, affirmant qu’aucun d’entre eux ne doit pouvoir en annexer un autre sous quelque prétexte que ce soit, car cela mène inévitablement à des conflits.
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Article 3 : "Les armées permanentes (militia perpetua) doivent progressivement disparaître." Kant considère les armées permanentes comme une menace permanente de guerre. Elles encouragent la méfiance et la compétition entre les États.
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Article 4 : "Il ne doit être contracté aucune dette publique en vue des affaires extérieures de l'État." Les dettes contractées pour financer des guerres ou des préparatifs de guerre sont condamnées par Kant, car elles mettent en péril la paix et la sécurité internationale.
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Article 5 : "Aucun État ne doit s'ingérer violemment dans la constitution et le gouvernement d'un autre État." Chaque État doit avoir le droit de s’autogouverner sans interférence extérieure, afin de respecter la souveraineté et l’indépendance.
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Article 6 : "Aucun État en guerre avec un autre ne doit se permettre des hostilités telles qui rendraient impossible la confiance réciproque pendant la paix future." Kant condamne les pratiques de guerre destructrices qui annihilent toute possibilité de réconciliation future entre les nations.
3. Les trois articles définitifs pour la paix perpétuelle
Après les conditions préliminaires, Kant propose trois articles définitifs qui doivent être mis en place pour garantir une paix durable :
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Article 1 : "La constitution civile de chaque État doit être républicaine." Kant n'entend pas ici par "république" une forme de gouvernement précise, mais un système où le pouvoir législatif est séparé du pouvoir exécutif, garantissant ainsi la liberté des citoyens. Ce système permet aux citoyens, et non à un monarque ou à une élite, de décider de la guerre ou de la paix.
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Article 2 : "Le droit des gens doit être fondé sur une fédération d'États libres." Kant propose une fédération d’États souverains qui s’unissent dans une association pacifique pour résoudre leurs conflits par la négociation plutôt que par la guerre. Il ne s’agit pas d’un État mondial, mais d'une fédération d’États respectant chacun la souveraineté de l’autre.
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Article 3 : "Le droit cosmopolitique doit être limité aux conditions de l'hospitalité universelle." Kant prône le droit cosmopolitique, qui garantit le droit de tout individu à être accueilli dans un autre pays en tant qu’étranger. Cela permettrait de renforcer les liens internationaux et d’empêcher les guerres liées aux migrations forcées ou aux conflits territoriaux.
4. Les articles secrets et les réflexions supplémentaires
Kant ajoute un article secret, qu'il présente comme un complément nécessaire. Selon lui, les philosophes doivent être consultés pour éclairer les questions politiques, car ils sont les mieux placés pour penser de manière désintéressée à l'avenir de l’humanité. Kant est persuadé que les dirigeants politiques devraient s’entourer de penseurs éthiques afin d’élaborer des politiques justes.
5. La morale et la paix perpétuelle
Kant aborde également la question du droit moral dans la sphère politique. Il oppose le réalisme politique, qui considère la guerre comme inévitable et l'intérêt national comme une priorité, à son idéalisme moral, qui affirme que la paix est possible à condition de respecter des principes moraux universels. Pour lui, la paix n'est pas seulement un idéal à atteindre, mais un devoir moral.
6. L’importance du droit et de la justice internationale
Kant insiste sur la nécessité d’un droit international pour réguler les relations entre les États. Ce droit doit garantir la justice et le respect des droits fondamentaux des États et des citoyens. La guerre, selon lui, doit être remplacée par des procédures juridiques permettant de régler les différends. Cela signifie que la force ne doit jamais être la solution, mais que la loi et les tribunaux internationaux doivent prévaloir.
Conclusion : Une paix réaliste mais difficile à atteindre
Vers la paix perpétuelle n’est pas une utopie irréalisable, mais un projet pragmatique qui repose sur la coopération internationale et le respect des principes moraux. Kant reconnaît que l’atteinte de la paix perpétuelle est difficile, car les intérêts nationaux et l’égoïsme des États sont des obstacles majeurs. Néanmoins, il insiste sur le fait que la paix est un objectif vers lequel l’humanité doit tendre.
Kant conclut que si les États agissent conformément aux principes de justice et de morale, il est possible d’éviter les guerres. La paix perpétuelle n’est pas une utopie, mais un impératif catégorique pour assurer la dignité et la survie de l'humanité.
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