Analyse du poème « Pluie » de Francis Ponge

Analyse du poème « Pluie » de Francis Ponge

Le poème « Pluie » de Francis Ponge est une description poétique d'un phénomène météorologique souvent méprisé : la pluie. Ce phénomène banal est pourtant singulier, surtout lorsqu'il s'agit d'une averse, qui est une pluie violente qui s'arrête rapidement. Cette spécificité rend la pluie ponctuelle et permet au poème de saisir un moment précis, sans avoir le début de l'averse. Ainsi, le poème est une description d'un temps donné, investi par la poésie malgré sa banalité. Cette description est présentée de manière scientifique et précise.

Le poème évoque également la synesthésie, notamment à travers le champ lexical et la description du bruit de la pluie. Le bruit particulier de la pluie est représenté par des onomatopées telles que « glou-glou », et est comparé à celui d'une horlogerie, avec le bruit du tic-tac. Le son de la pluie est présenté de façon élogieuse, comme un concert sans monotonie, non sans délicatesse. L'allitération en [g] renforce cette description, notamment avec l'expression « glou-glou des gouttières ». La vue est également décrite, en mettant en avant l'allure de la pluie.

Le cadre du poème est la cour, un lieu clos qui ne permet pas au regard de s'échapper. La description s'arrête à ce cadre, qui ne se réduit pas seulement à la cour mais qui en est le point de départ. Les accoudoirs, les murs droits et gauches, le toit de zinc, les gouttières, et la ville en arrière-plan sont autant d'éléments qui créent un cadre étroit et fermé.

Le poème utilise également le passé pour décrire la pluie, qui est maintenant finie. Le participe passé de « pleuvoir » et « plaire » joue sur un jeu de mots, puisque le poème « a plu ».

Le regard du poète est au centre du poème. Le point de vue est relatif, et le poème est présenté de manière subjective, avec l'utilisation de mots tels que « probablement » et « semblent ». La pluie est décrite de manière personnelle, et peut être différente de la perception du lecteur. La pluie revêt des formes très diverses, avec des comparaisons et des métaphores qui montrent les différentes formes des gouttes. Les gouttes peuvent avoir l'apparence de grain de blé, pois, bille, berlingots convexes. Elles se rejoignent ensuite pour former d'autres formes, telles qu'une nappe très mince, un ruisseau creux, un filet parfaitement vertical, ou des aiguillettes brillantes.

La disposition typographique du poème est libre, avec quatre paragraphes de plus en plus courts. Cette disposition est mimétique, rappelant une averse soudaine qui se calme ensuite. Malgré cette forme libre, on ressent un effort typologique pour classer les différents types de gouttes.

Le poème évoque également un cycle mécanique, avec l'utilisation de termes tels que « horlogerie », « mécanique », « rouages », « ressort », « machinerie », « appareil brillant », « sonnerie » et « gong ». Le poème décrit les différents événements qui s'enchainent lorsqu'il pleut : le petit toit de zinc ruisselle en nappe, l'eau se déverse dans la gouttière attenante, forme un filet parfaitement vertical qui finit par atteindre le sol, et qui rejaillit en aiguillettes brillantes. Ce mécanisme est éphémère et ne laisse pas de traces une fois que le soleil réapparait. Le poème souligne donc l'idée que tout a une fin, comme dans le poème « Le Cageot » de Francis Ponge. Le temps du poème est plus court que l'averse elle-même, car nous n'avons pas le début de l'averse, mais seulement sa fin.

Enfin, le poème évoque le proverbe « Après la pluie le beau temps », soulignant ainsi le cycle qui se répète sans cesse : la pluie est suivie du beau temps, puis la pluie revient à nouveau. Le poème de Francis Ponge invite ainsi le lecteur à porter un regard nouveau sur la pluie, qui peut être vue comme un phénomène singulier et beau, plutôt que comme quelque chose de banal et méprisé.

En somme, le poème « Pluie » de Francis Ponge est une description poétique et scientifique d'un phénomène météorologique banal mais singulier, qui invite le lecteur à porter un regard nouveau sur la pluie. La synesthésie, le cadre, le regard du poète, la disposition typographique, le cycle mécanique et le proverbe évoqués dans le poème contribuent à créer une vision nouvelle et poétique de la pluie.

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