Analyse linéaire du poème Spleen LXXV de Baudelaire "Pluviôse"

Analyse linéaire du poème Spleen LXXV de Baudelaire "Pluviôse"

Le poème Spleen LXXV de Baudelaire est le plus ancien et le premier des quatre spleens qui composent Les Fleurs du mal. Publié pour la première fois en 1851, il a été inclus dans Les Fleurs du mal en 1857. Ce poème se trouve dans la première partie de l'ouvrage, qui s'intitule "Spleen et idéal". Le spleen est défini comme un état de malaise, et Baudelaire choisit une forme stricte pour évoquer cet état, contrairement aux autres spleens.

Le sonnet en alexandrin est presque régulier, sauf pour les rimes du quatrain, qui sont croisées (ABAB) au lieu d'être embrassées (ABBA). Le poète parle ici à la première personne, évoquant apparemment son environnement : la pluie sur la ville, une cloche au son grave, son chat, le bourdon, la bûche, la pendule et pour finir deux cartes à jouer.

Cependant, en réalité, il fait de ces éléments des symboles de son état de spleen, transformant cet espace quotidien en un ensemble hanté par le mal d'être, l'incapacité à dire et à chanter.

Dans le premier quatrain, Pluviôse, un mois d'hiver, est personnifié comme irrité, versant le froid et la mort sur la ville. Le mot pluviôse, mis en valeur en tête de poème, évoque la pluie, le froid, la révolution et la mort, servant de point de départ à toutes les images du premier quatrain. Le champ lexical de l'angoisse, appelé par l'irritation de Pluviôse, suggère un monde entre la vie et la mort, atmosphère inquiétante et pâles habitants.

Dans le deuxième quatrain, le poète se perçoit à travers son chat, l'interprétation devenant plus délirante. Le chat et le poète sont une seule et même chose, substituables l'un à l'autre, soumis au froid, à l'humidité et à la maladie. Le centre du poème est au niveau des vers 7-8, où la voix du poète triste n'est plus qu'un chuchotement, au bord de l'extinction. Le poète, en proie au spleen, se perçoit sous la pitoyable apparence d'un chat maigre et sans voix, incapable de chanter, de parler ou de créer.

Le premier tercet utilise des verbes tels que se lamentent, accompagne en fausset et l'adjectif enrhumée, convenant autant au poète qu'aux objets. La bûche ne brûle pas, elle se consume, le bourdon évoque le glas, et surtout, tous ces objets symbolisent l'incapacité du poète à chanter.

Les deux cartes à jouer du deuxième tercet sont également celles qui disent l'avenir. Cependant, le jeu est déprécié, plein de sales parfums, ce qui est inhabituel pour Baudelaire, qui évoque généralement des parfums exotiques dans ses poèmes. Cette évocation renforce le sentiment de spleen qui imprègne le poème.

Ce jeu provient d'une vieille hydropique, continuant le thème de l'eau de manière malsaine. Ce jeu est un héritage fatal que le poète ne peut pas éviter, et les cartes symbolisent son destin. Les deux cartes qui causent sinistrement annoncent au poète en proie au spleen qu'il sera condamné à la mort de l'amour.

En conclusion, ce poème de Baudelaire nous présente le spleen comme un sentiment de malaise physique et moral. Il exprime poétiquement le spleen à travers des suites d'images symboliques de plus en plus fantastiques et délirantes. En utilisant une forme stricte pour évoquer cet état, Baudelaire accentue l'impact des images symboliques qu'il utilise pour décrire son environnement et son état d'esprit. La transformation des éléments quotidiens en symboles de son spleen offre une perspective poétique unique sur cet état d'être.

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