Analyse de Dom Juan de Molière

Analyse de Dom Juan de Molière

Analyse de Acte I scène 1, Comment, dans cette scène d’exposition surprenante, Molière dresse-t-il un portrait inquiétant de Dom Juan à  travers les paroles comiques de son valet ?

I) Le portrait de Dom Juan par Sganarelle 

a) L’impiété

Sganarelle nous dépeint son maître comme une personne impie : “qui ferme l'oreille à toutes les remontrances chrétiennes qu'on lui peut faire, et traite de billevesées tout ce que nous croyons.”

 

b) Un débauché

De plus, Sganarelle insiste sur le caractère débauché de son maître qui enchaîne les conquêtes sans se préoccuper de la classe sociale des femmes qu’il séduit :  

“et c'est un épouseur à toutes mains. Dame, demoiselle, bourgeoise, paysanne, il ne trouve rien de trop chaud ni de trop froid pour lui”. 

 

c) Un grand seigneur 

Ensuite, le valet s’indigne du mauvais usage que Dom Juan fait du pouvoir qu’il détient en raison de son haut rang social, et dont il se sert pour avoir un ascendant sur les femmes qu’il poursuit de ses assiduités, comme le montre l’emploi de l’adjectif “terrible” dans la phrase : “Mais un grand seigneur méchant homme est une terrible chose”. 

 

d) Les éléments tragiques

Sganarelle fait une prolepse du futur châtiment de Dom Juan, qui sera puni par Dieu à la fin de la pièce, dans la phrase : il me fait voir tant d'horreurs, que je souhaiterais qu'il fût déjà je ne sais où.”

 

II) Sganarelle un valet de comédie

a) La crédulité 

Sganarelle fait preuve de crédulité en se confiant à Gusman, il regrette ses paroles et menace alors Gusman : “Écoute au moins : je t'ai fait cette confidence avec franchise, et cela m'est sorti un peu bien vite de la bouche ; mais s'il fallait qu'il en vînt quelque chose à ses oreilles, je dirais hautement que tu aurais menti.”

 

b) Sganarelle un lâche et un poltron

Sganarelle est représenté comme un lâche et un poltron, il redoute son maître et doit acquiescer à toutes ses paroles sous peine d’être battu comme le montre la citation  “la crainte en moi fait l'office du zèle, bride mes sentiments, et me réduit d'applaudir bien souvent à ce que mon âme déteste.”

De plus le valet montre sa lâcheté à travers ses paroles, il redoute  les représailles de son maître après s’être confié à Gusman. Il menace alors ce dernier de nier tout en bloc s’il n’arrive pas à garder sa langue : “Écoute au moins : je t'ai fait cette confidence avec franchise, et cela m'est sorti un peu bien vite de la bouche ; mais s'il fallait qu'il en vînt quelque chose à ses oreilles, je dirais hautement que tu aurais menti.”

 

c) La fascination de Sganarelle pour son maître 

Le valet est très admiratif de son maître comme le montre l’hyperbole : “le plus grand scélérat que la terre ait jamais porté.”

Pour se faire valoir, Sganarelle tente d’impressionner Gusman par les exploits d’un maître peu ordinaire, il crée ainsi l’attente et le suspense :  “ce serait un chapitre à durer jusques au soir.”

 

d) Sganarelle un personnage comique (malgré lui)

Sganarelle tente d’utiliser un langage élégant mais sombre avec la comparaison animalière. De plus l’auteur utilise  l’amplification  du comique : “et qu'avec elle il aurait encore épousé toi, son chien et son chat”.

Analyse de Acte I scène 3, Comment les personnage de Dom Juan et de Done Elvire s’opposent-ils dans cette scène ?

I) Done Elvire, une héroïne tragique et pathétique

 

1. Le tragique

 

Done Elvire, dans "Dom Juan" de Molière, incarne la figure de la femme tragique et pathétique. Sa réplique, « Que ne vous armez-vous le front d'une noble effronterie ? », démontre son attente d'une noblesse de comportement chez Dom Juan, reflétant ainsi son propre idéal d’honneur et de dignité. La tragédie de son personnage est soulignée par sa demande désespérée d'assurances d'amour éternel: « Que ne me jurez-vous que vous êtes toujours dans les mêmes sentiments pour moi, que vous m'aimez toujours avec une ardeur sans égale, et que rien n'est capable de vous détacher de moi que la mort ? » Ces mots révèlent la profondeur de son amour, la rendant tragiquement sublime dans sa capacité à pardonner la trahison.

 

Son discours, imprégné du champ lexical de la tragédie — "brûlez", "souffrez", "un corps qui est séparé de son âme" — illustre sa passion aveuglante, la poussant à demander à Dom Juan de s'inscrire dans son récit révisionniste de leur relation. Cette demande, où elle lui souffle les mots à dire, « Voilà comme il faut vous défendre, et non pas être interdit comme vous êtes », marque son désespoir face à la réalité crue de la situation. Cependant, elle retrouve sa noblesse et son honneur dans sa prophétie de vengeance divine, affirmant sa dignité malgré la perte de son amour: « Je te le dis encore, le Ciel te punira, perfide, de l'outrage que tu me fois. »

 

2. Le pathétique

 

Done Elvire, dans sa naïveté et sa pitié envers Dom Juan, révèle également sa nature pathétique. Sa réplique « Ah ! que vous savez mal vous défendre pour un homme de coeur, et qui doit être accoutumé à ces sortes de choses ! » montre sa compassion mal placée pour un homme qui l’a trahi. Cette compassion, teintée d'une certaine ironie tragique, souligne sa déception lorsqu'elle réalise sa véritable nature: « Ah ! scélérat, c'est maintenant que je te connais tout entier. » Cette prise de conscience, trop tardive, la plonge dans un désespoir profond, lui conférant un aspect encore plus pathétique.

 

II) Dom Juan, un personnage libertin

 

1. Le libertinage de mœurs

 

Dom Juan, un archétype du libertinage, se révèle à travers ses interactions avec Done Elvire. Ses mensonges, « Je vous avoue, Madame, que je n'ai point le talent de dissimuler, et que je porte un coeur sincère », contrastent fortement avec sa véritable nature. Cette ironie, où il admet ouvertement son intention de fuir Elvire, révèle son caractère libertin : « Je ne vous dirai point que je suis toujours dans les mêmes sentiments pour vous. » Son départ abrupt et sa déclaration « Allons songer à l'exécution de notre entreprise amoureuse » illustrent sa cruauté et son insensibilité, mettant en lumière son libertinage de mœurs.

 

2. Le libertinage religieux

 

Dom Juan utilise également la religion pour justifier ses actes, révélant ainsi son libertinage religieux. Sa justification de la fuite par des motifs religieux, « non point par les raisons que vous pouvez vous figurer, mais par un pur motif de conscience », montre son hypocrisie et son manque de sincérité. Il invoque la colère divine comme excuse, tout en sachant que son comportement est en réalité blasphématoire. Cette manipulation des valeurs religieuses est encore plus évidente lorsqu'il prétend craindre le courroux divin, « Le repentir m'a pris, et j'ai craint le courroux céleste », alors qu'en vérité, il ne fait qu'utiliser la religion comme un voile pour dissimuler ses véritables intentions. La réplique de Sganarelle, « Vraiment oui, nous nous moquons bien de cela, nous autres », ajoute une touche comique, tout en soulignant la complicité

Analyse de Acte II scène 3,  Comment fonctionne le comique dans cette scène ?

I) La naïveté comique de Charlotte ( fantasme et vocabulaire concret)

a) Charlotte entre fantasme…

Charlotte croit naïvement que Dom Juan veut l’épouser : “Oh, Piarrot, ce n’est pas ce que tu penses, ce Monsieur veut m’épouser, et tu ne dois pas te bouter en colère.” De plus elle croit qu’elle pourra ainsi devenir plus riche : “si je sis Madame, je te ferai gagner queuque chose, et tu apporteras du beurre et du fromage cheux nous.” et s’élever dans la société : “Ça n’y fait rien, Piarrot, si tu m’aimes, ne dois-tu pas être bien aise que je devienne Madame ?” 

 

b) … et réalité

En réalité, Charlotte n’est qu’une paysanne qui a été séduite par Dom Juan et elle est fiancée à Pierrot : “Jerni, tu m’es promise” et elle croit à tort que Dom Juan a raison de la séduire et d’humilier Pierrot : “ Et laisse-le faire aussi, Piarrot.”

 

II) La révolte pathétique de Pierrot (qui considère Charlotte comme un objet en sa possession)

a) Le langage ridicule du paysan

Pierrot utilise un langage très familier, ce qui le rend ridicule : “Morquenne, ça n’est pas bian de battre les gens”.

Ce langage montre que Pierrot n’est pas instruit, il est donc impossible pour lui de rivaliser avec Dom Juan : “Je vous dis qu’ou vous tegniez, et qu’ou ne caressiais point nos accordées.” 

 

b) Une vision avilissante de la femme

Pierrot pense posséder Charlotte, il la considère tel un objet : “j’aime mieux te voir crevée que de te voir à un autre”. 

Charlotte reste un enfant aux yeux de Pierrot puisqu’il entend l’éduquer à sa manière, ce qui montre bien que dans tous les milieux sociaux la femme est entièrement soumise à son père puis à son mari au XVIIème siècle, elle reste “mineure” toute sa vie : “Je me veux fâcher, et t’es une vilaine, toi, d’endurer qu’on te cajole”. 

 

III) Le regard ironique de Dom Juan et Sganarelle (en position de spectateurs)

a) Sganarelle

Sganarelle se place en tant qu’arbitre entre Pierrot et Dom Juan puisqu’il parle à l’un puis à l’autre sans chercher à les confronter : “Eh, Monsieur, laissez là ce pauvre misérable. C’est conscience de le battre. Écoute, mon pauvre garçon, retire-toi, et ne lui dis rien.”  Sganarelle éprouve de la compassion pour Pierrot puisqu’il le qualifie par “pauvre misérable” et par “pauvre garçon”. 

 

b) Dom Juan

Dom Juan se sent supérieur à Pierrot et n’hésite donc pas à le ridiculiser et l’humilier : “Ah, que de bruit !”, “Qu’est-ce que vous dites ?”, Il considère les paroles de Pierrot sans importance car elles sont si mal tournées qu’il les dénigre. Le langage de Pierrot reflète son rang social et Dom Juan se sent tellement supérieur qu’il s’autorise à le frapper comme s’il était son valet alors qu’il vient de lui sauver la vie : “s’approchant de Pierrot pour le frapper”. 

Dom Juan n’a aucune reconnaissance puisqu’il séduit la fiancée de son sauveur, mais surtout il bafoue encore une fois les valeurs chrétiennes : “Te voilà payé de ta charité.”

Analyse de Acte II scène 4, Comment fonctionne le double discours dans cette scène ?

Dans cette scène de "Dom Juan" de Molière, la complexité et la ruse des dialogues révèlent une profonde exploration de l'hypocrisie et de la manipulation. L'analyse de cette scène, à travers la duplicité de Dom Juan et de Sganarelle, met en lumière les thèmes de la tromperie et de la confusion des identités.

 

I/ La duplicité de Dom Juan envers les paysannes

 

Dom Juan, dans son interaction avec Charlotte et Mathurine, incarne l'archétype du séducteur manipulateur. Sa tactique de diversion, « Que voulez-vous que je dise ? », lui permet de maintenir une confusion délibérée entre les deux femmes, évitant ainsi de se compromettre. Cette ambigüité, renforcée par son discours vague et évasif, souligne sa maîtrise de la manipulation. Il joue avec leurs sentiments en leur faisant croire, alternativement et secrètement, qu'elles sont chacune l'objet de son amour : « (Bas à Mathurine.) Je vous adore. (Bas, à Charlotte.) Je suis tout à vous. » Cette stratégie révèle non seulement son ingéniosité mais aussi son indifférence morale, exploitant sa position sociale pour abuser de leur naïveté. Le fait que les paysannes croient chacune être l'élue de Dom Juan démontre l'efficacité de sa ruse, exacerbant ainsi la tragédie de leur méprise.

 

II/ La duplicité de Sganarelle envers Dom Juan

 

Sganarelle, de son côté, est tiraillé entre son devoir envers son maître et sa compassion pour les paysannes. Ses avertissements aux jeunes femmes, « Ah ! pauvres filles que vous êtes, j’ai pitié de votre innocence », révèlent son désir de les protéger contre les mensonges de Dom Juan. Cette bienveillance contraste fortement avec le changement abrupt de son discours lorsque Dom Juan apparaît : « Cela est faux ; et quiconque vous dira cela, vous lui devez dire qu’il en a menti. » Sganarelle adopte alors un double langage, oscillant entre la sincérité et la flatterie, démontrant ainsi la complexité de sa position de valet loyal mais moralement conscient.

 

En conclusion, cette scène illustre la superposition de deux doubles discours qui créent un effet de théâtre dans le théâtre. D'une part, Dom Juan, manipulateur et indifférent, s'amuse à tromper les paysannes, jouant sur les mots et les sentiments. D'autre part, Sganarelle, déchiré entre la loyauté envers son maître et la compassion envers les victimes de celui-ci, oscille entre vérité et mensonge. Cette cacophonie de discours souligne l'habileté de Molière à dépeindre les nuances de la nature humaine, tout en critiquant les travers sociaux de son époque, notamment l'hypocrisie et l'abus de pouvoir.

Analyse de Acte III scène 1, Comment Molière met-il en place une parodie de disputation dans cet extrait ?

Dans cet extrait de l'acte III, scène 1 de "Dom Juan", Molière crée une parodie de disputation en opposant deux visions du monde : celle de Sganarelle, ancrée dans la morale chrétienne, et celle de Dom Juan, imprégnée de libertinage religieux. L'usage de l'ironie et du comique accentue la portée critique de cette confrontation.

 

I) Sganarelle, représentant de la morale chrétienne

 

Sganarelle, dans cette scène, incarne la voix de la foi et de la simplicité. Ses répliques, telles que « La belle croyance, que voilà », expriment son étonnement et son désaccord face aux idées de son maître. Il souligne, avec un certain bon sens, les limites de la connaissance humaine : « pour avoir bien étudié, on en est bien moins sage le plus souvent ». Son argumentation se base sur l'observation et la logique simple, comme lorsqu'il dit : « ce monde que nous voyons, n'est pas un champignon qui soit venu tout seul en une nuit. » Sganarelle, malgré son manque d'éducation formelle, se positionne comme un défenseur de la foi, usant d'arguments théologiques intuitifs et de la rhétorique du bon sens. Son incapacité à prononcer le mot « âme » tout en décrivant son essence traduit une certaine naïveté touchante, typique de son statut social.

 

II) Le libertinage religieux de Dom Juan

 

En réponse, Dom Juan incarne le scepticisme et le matérialisme. Sa réponse, « Je crois que deux et deux sont quatre, Sganarelle, et que quatre et quatre sont huit », est une déclaration de foi dans le rationnel, rejetant ainsi toute notion de divinité ou de mystère. Ce rationalisme extrême est une caractéristique du libertinage religieux, qui se moque des croyances traditionnelles. Son silence face aux arguments de Sganarelle, « J'attends que ton raisonnement soit fini », est une marque de mépris pour la foi simple et sincère de son valet, soulignant ainsi le contraste entre leur deux visions du monde.

 

III) L’ironie

 

L'ironie est un élément clé dans cette scène, à la fois dans les propos de Sganarelle et dans l'attitude de Dom Juan. Sganarelle, par ses questions naïves mais pertinentes, « Qui a fait ces arbres-là, ces rochers, cette terre, et ce ciel que voilà là-haut ? », tente d'ébranler la certitude matérialiste de Dom Juan. Son manque de maîtrise dans l'art de la dispute est rendu comique par ses arguments simplistes et son espoir d'être interrompu, « Oh dame, interrompez-moi donc si vous voulez ». Dom Juan, quant à lui, utilise l'ironie pour déstabiliser Sganarelle, son commentaire final « Bon, voilà ton raisonnement qui a le nez cassé » soulignant le ridicule de la situation.

 

En conclusion, Molière utilise cette scène pour explorer, avec humour et profondeur, les thèmes du scepticisme, de la foi et de la condition humaine. La confrontation entre Sganarelle et Dom Juan, mêlant sérieux et comique, est une illustration brillante de la complexité des débats religieux et philosophiques de l'époque, tout en offrant une critique subtile de la société et de ses contradictions.

Analyse de Acte III scène 2, Quels aspects de la personnalité de Dom Juan sont mis en valeur dans cette scène ?

Dans cette analyse de "Dom Juan" de Molière, nous explorons la cruauté et l'impiété du personnage principal, en particulier dans sa rencontre avec un Pauvre. Cette scène révèle les dimensions complexes de la personnalité de Dom Juan à travers ses interactions et son discours.

 

I) La cruauté

1. L’insolence

 

Dom Juan, par son traitement du Pauvre, exhibe une insolence marquée, un trait caractéristique de sa personnalité cruelle. L'expression « Je te suis bien obligé, mon ami, et je te rends grâce de tout mon cœur » est empreinte d'une ironie mordante, où l'usage de l'hyperbole souligne son mépris dissimulé derrière des apparences de politesse. Sa manière de se moquer du Pauvre, en remettant en question la sincérité de ses prières, « Tu te moques; un homme qui prie le Ciel tout le jour, ne peut pas manquer d'être bien dans ses affaires », illustre sa nature moqueuse et son indifférence aux souffrances d'autrui.

 

2. Le plaisir cruel

 

Dom Juan tire un plaisir sadique de la détresse du Pauvre, se moquant de sa foi et de sa condition précaire. En prenant les paroles du Pauvre au sens littéral, il révèle un esprit tordu qui se délecte de la confusion et de l'humiliation d'autrui : « Eh, prie-le qu'il te donne un habit, sans te mettre en peine des affaires des autres. » Cette attitude souligne la cruauté inhérente à la personnalité de Dom Juan, qui se manifeste dans son interaction avec les personnages les plus vulnérables.

 

II) L’impiété

1. L’orgueil

 

L'orgueil de Dom Juan est mis en évidence par son valet, Sganarelle, qui dépeint son maître comme un homme éloigné de toute foi divine : « Vous ne connaissez pas Monsieur, bon homme, il ne croit qu'en deux et deux sont quatre, et en quatre et quatre sont huit. » Cette déclaration souligne l'attitude matérialiste et sceptique de Dom Juan, qui ne reconnaît que la rationalité et rejette toute notion de divin. Sa colère lorsqu'il est confronté à la résistance du Pauvre, « Prends, le voilà, prends te dis-je, mais jure donc », est un reflet de son arrogance et de son désir de dominer et de contrôler les croyances d'autrui.

 

2. Une incarnation de Satan

 

Dom Juan, dans cette scène, est présenté comme une figure diabolique, utilisant son pouvoir et son influence pour tenter et corrompre. Sa proposition au Pauvre, « Je m'en vais te donner un Louis d'or tout à l'heure, pourvu que tu veuilles jurer », rappelle la tentation de Satan dans le désert, où il offre des richesses terrestres en échange de la soumission spirituelle. Le refus du Pauvre de succomber à la tentation contraste avec l'attitude impie de Dom Juan, mettant en évidence la nature diabolique de ce dernier.

 

En conclusion, cette scène de "Dom Juan" met en lumière les traits cruels et impies du protagoniste. À travers son interaction avec le Pauvre, Dom Juan révèle son mépris pour les faibles, son plaisir à tourmenter autrui, et son rejet de toute moralité ou foi religieuse. Molière utilise ces interactions pour critiquer les abus de pouvoir et l'hypocrisie de la société de son temps, tout en explorant les thèmes plus larges de la condition humaine.

Analyse de Acte IV scènes 7 et 8

Dans "Dom Juan", Molière utilise habilement le burlesque et l'ambiguïté pour maintenir le ton de la comédie, même dans des moments graves et solennels. Cela est particulièrement évident dans la scène de l'arrivée de la statue du Commandeur, où le dramaturge parvient à alléger la gravité de la situation par l'intermédiaire de Sganarelle, le valet, tout en préservant l'impact moral et dramatique de la scène.

 

I. Le burlesque : Sganarelle, valet de la tradition italienne

 

1. Le comportement du valet

 

Sganarelle, s'inscrivant dans la tradition de la commedia dell'arte, apporte un élément burlesque à la scène. Ses tentatives de vol, ses pitreries, et sa peur excessive provoquent le rire, allégeant ainsi la tension dramatique de la situation. Même lorsque Dom Juan se joue de lui, Sganarelle parvient à faire rire les spectateurs, dédramatisant l'ambiance sinistre de l'arrivée du Commandeur.

 

2. La fonction remplie par Sganarelle sur le plan de l’action

 

Sganarelle sert à atténuer l'effet moralisateur de la visite du Commandeur. Sa présence et ses réactions comiques face à la situation contrastent avec l'insouciance de Dom Juan, mettant en relief la différence entre les deux personnages. La peur de Sganarelle souligne l'audace de Dom Juan, réduisant l'intensité de la leçon morale véhiculée par la statue.

 

II. L’ambigüité : la valeur respective des deux personnages

 

1. Valorisation de Dom Juan par Molière

 

Dom Juan, malgré son destin tragique imminent, est présenté sous un jour favorable. Sa générosité envers son valet, sa courtoisie envers le Commandeur, et son insouciance interprétée comme du courage, lui confèrent une aura héroïque. Molière le valorise, créant une ambiguïté quant à la nature véritable du personnage : est-il vraiment le méchant de l'histoire ?

 

2. Le commandeur : envoyé de Dieu

 

Le Commandeur, bien que n'ayant que deux répliques, joue un rôle crucial. Ses paroles solennelles et laconiques accélèrent la trame de la pièce et renforcent la gravité de la situation. Représentant la colère divine, ses propos sont directs et indétournables, contrastant avec le comportement de Dom Juan et Sganarelle.

 

Conclusion

 

La scène de l'arrivée du Commandeur chez Dom Juan, bien que marquée par une gravité et une solennité certaines, est adoucie par le caractère comique de Sganarelle. Ce dernier, par son comportement bouffon, atténue le sérieux de la situation, permettant au spectateur de conserver un certain détachement. Ainsi, Molière prépare le terrain pour un dénouement où l'effet tragique de la mort du héros est tempéré par la présence et les actions du valet, en accord avec le ton de la tragi-comédie.

Analyse de Acte V scènes 4, 5, 6, Est-ce vraiment un dénouement de comédie ?

Dans "Dom Juan" de Molière, on observe une fusion habile des caractéristiques de la comédie et de la tragédie, créant une œuvre riche et complexe. L'analyse de cette fusion est cruciale pour comprendre la portée et la profondeur de la pièce.

 

I) Les caractéristiques de la comédie

 

La pièce présente plusieurs éléments typiques de la comédie, notamment à travers le personnage de Dom Juan et ses interactions. Sa réplique ironique, « Si le Ciel me donne un avis, il faut qu'il parle un peu plus clairement, s'il veut que je l'entende », incarne l'humour et le sarcasme. De même, sa bravade face à la statue, « Non, non, rien n'est capable de m'imprimer de la terreur », confine au ridicule, soulignant son refus obstiné de reconnaître la réalité surnaturelle.

 

L'intervention de la statue, « Arrêtez, Dom Juan : vous m'avez hier donné parole de venir manger avec moi », ajoute au comique de la situation, tout en révélant l'irrévérence et le manque d'honneur de Dom Juan. La mort de Dom Juan, bien que dramatique, est traitée avec un certain comique, surtout dans la réaction de Sganarelle, « Ah ! mes gages ! mes gages ! », où la répétition et l'égoïsme du personnage apportent une touche humoristique à la fin tragique de son maître.

 

II) Les caractéristiques de la tragédie

 

D'un autre côté, la pièce emprunte aussi des éléments de la tragédie. Sganarelle, bien qu'étant un personnage comique, joue un rôle sérieux quand il avertit Dom Juan des conséquences de ses actions, « Monsieur, quel diable de style prenez-vous là ? ». Sa tentative d'éveiller la conscience de Dom Juan, et l'échec qui s'ensuit, donnent à la pièce une dimension tragique.

 

Dom Juan lui-même, par son refus de se repentir face aux avertissements surnaturels, incarne le héros tragique en lutte contre un destin inéluctable. Sa réplique, « Non, non, il ne sera pas dit, quoi qu'il arrive, que je sois capable de me repentir », souligne son orgueil et son défi face au divin, éléments caractéristiques de la tragédie.

 

L'apparition du spectre et le changement de figure de la statue en temps avec sa faux, renforcent cette impression tragique, rappelant les chœurs des tragédies antiques qui annoncent le destin des personnages. La mort de Dom Juan, frappé par un « feu invisible », est une conclusion typiquement tragique, où le personnage paie de sa vie son refus de se soumettre à une puissance supérieure.

 

En conclusion, "Dom Juan" de Molière est une œuvre qui transcende les genres, mêlant comédie et tragédie pour créer une pièce complexe et nuancée. Cette fusion permet à Molière d'explorer des thèmes tels que l'hypocrisie, l'orgueil, et la rédemption, tout en critiquant les aspects sociaux et religieux de son époque. La pièce se termine sur une note à la fois comique et tragique, reflétant la dualité de la condition humaine.

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