Analyse de Les corbeaux de Rimbaud
Le poème de Rimbaud que vous évoquez semble s'articuler autour de trois axes principaux : une prière inhabituelle, la représentation d'un paysage de désolation, et une dénonciation poignante de la guerre.
I) Une prière
Le poème débute par une apostrophe à Dieu, "Seigneur", ce qui lui confère immédiatement une tonalité de prière. Cette invocation divine est suivie d'une demande surprenante : la venue des corbeaux, traditionnellement symboles de mort, mais ici évoqués de manière positive, "Les chers corbeaux délicieux." Cette image inattendue des corbeaux comme messagers positifs de la mort suggère une réconciliation avec l'inévitable finitude. Rimbaud poursuit en s'adressant à Dieu sur un ton de reproche, évoquant les "routes aux vieux calvaires", symboles de la souffrance humaine et de la guerre que Dieu n'a pas empêchée. Il demande ensuite aux corbeaux de devenir "le crieur du devoir", une métaphore pour inciter à la mémoire collective de la défaite. Enfin, il implore Dieu et les saints de faire cesser les guerres, illustrant un désir profond de paix et de réconciliation.
II) Un paysage de désolation
Le poème peint un tableau de désolation, où la nature elle-même semble affectée par la guerre et la défaite. "Quand froide est la prairie" suggère un paysage désolé, presque gelé par la tragédie. "Dans les hameaux abattus" renvoie à la destruction causée par la guerre, tandis que "Les longs angélus se sont tus…" symbolise un arrêt de la vie et de la spiritualité. L'apostrophe aux corbeaux, "Vous, le long des fleuves jaunis", évoque des cours d'eau pollués par les débris de la guerre, renforçant l'image d'un paysage ravagé.
III) Une dénonciation de la guerre
Rimbaud utilise son poème pour dénoncer les horreurs de la guerre. La métaphore "quand froide est la prairie" suggère l'image d'un champ de bataille mortel. "Armée étrange aux cris sévères, Les vents froids attaquent vos nids !" peut être interprété comme une allégorie de la guerre, avec un vocabulaire militaire et un champ lexical de la peur. "Par milliers, sur les champs de France, Où dorment des morts d'avant-hier," dépeint la France comme un vaste champ de bataille jonché de cadavres, soulignant l'ampleur de la tragédie. Rimbaud exprime son désir que tout le monde se souvienne des horreurs de la guerre, pour éviter de répéter les mêmes erreurs. Il décrit les soldats comme prisonniers de la guerre, "La défaite sans avenir", soulignant leur impuissance et leur désespoir. Le dernier vers, détaché, met en exergue cette idée de piège inéluctable de la guerre. Le poème, riche en allitérations en [t] et en [r], rappelle les bruits de la guerre et accentue la souffrance des soldats, renforçant ainsi la puissance de la dénonciation de Rimbaud.
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