Le langage nous permet-il d'agir sur la réalité ?

Le langage nous permet-il d'agir sur la réalité ?

« La parole est nécessaire pour que la langue s’établisse, la langue ne peut vivre qu’à travers la parole qui sous-tend tous les autres langages humains » dit Ferdinand de Saussure. L’homme agit sur la réalité grâce à la parole ; la parole fait être et vivre la langue, elle est l’individualisation. La langue n’existe que parce qu’il y a des sujets parlants. La langue n’est pas un double de la réalité, elle est ce grâce à quoi je me représente la réalité et lorsque je prends la parole je ne dis pas les choses, j’exprime mes intentions, c’est-à-dire mon analyse de la réalité, mes désirs, mes sentiments. La réalité de mon esprit n’existe que si elle est exprimée. Nous pensons dans les mots et la langue a à la fois une fonction d’expression et de communication. Ma pensée existe à travers la parole, les pensées pures n’existent pas. Il n’y a pas de réalité de la communication humaine sans langue, sans parole et sans communication par le langage.

La parole est performative : on agit sur autrui par la parole, tout discours est un acte. Lorsque je promets de dire la vérité, je ne décris rien, j’accomplis un acte. Les linguistes parlent de la fonction appellative du langage, la parole qui rassemble, qui émeut, qui est utilisée par les prêtres, les politiques, les amants.

Le langage s’exprime essentiellement à travers la parole mais il y a également un langage de l’art. Le langage n’a pas qu’une fonction pratique et utilitaire, il a aussi une fonction poétique. Non seulement le langage agit sur la réalité mais il produit de la réalité : le monde de l’art.

Le problème c’est que le langage peut traduire la déraison et la folie (comme l’exprime le théâtre de Shakespeare, en particulier dans Le Roi Lear ou La Tempête), une volonté de puissance néfaste, une illusion. Les mots peuvent charmer et tromper. La parole peut donner l’illusion d’une communication, et même être meurtrière. La parole traduit les intentions d’un sujet pensant et voulant, elle traduit la nature ambivalente de l’homme entre la raison et la folie.

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