La Princesse de Clèves de Madame de La Fayette Analyse de l'oeuvre intégrale chapitre par chapitre lecture analytique pour le bac de français

La Princesse de Clèves de Madame de La Fayette Analyse de l'oeuvre intégrale chapitre par chapitre

Incipit. Première partie, Du début à «l’ornement et l’admiration de leur siècle.»

I) Le cadre historique du récit

a) Les informations transmises par l’incipit

Tout d'abord on remarque la présence de plusieurs indices de temps : “les dernières années”, “il y avait plus de vingt ans”. On remarque également plusieurs indices de lieu : “en France” revient plusieurs fois dans le texte, “chez la reine”.  De plus les personnages sont qualifiés à la fois par leur nom et leur titre : “Marie Stuart, reine d’Écosse, qui venait d’épouser M. le dauphin, et qu’on appelait la Reine Dauphine”. Madame de La Fayette accorde une grande important aux conventions sociales et à la nobles. Certains de ces personnages ont réellement existé tel Henri II et Marie Stuart. Madame de La Fayette veut ainsi renforcer l’illusion de réel de son roman pour faire faire croire au lecteur qu’elle lui raconte une histoire vraie.

 

b) Les prémices d'une tragédie

Nous observons que Madame de La Fayette utilise à de nombreuses reprises la négation : “elle n’en témoignait aucune jalousie”, “dont il n’était pas amoureux”. Ces négations créent un climat inquiétant car il ne se dégage rien de positif. Ensuite dans cet incipit on peut remarquer la présence de la mort (“le dauphin, qui mourut à Tournon”) qui contraste avec l’atmosphère apparemment festive de la cour. De plus Madame de la Fayette utilise le champ lexical de la violence : “ violente”, “souffrît”. Enfin la phrase finale “Ceux que je vais nommer étaient, en des manières différentes, l’ornement et l’admiration de leur siècle” est ironique puisque bien que tous les courtisans soient magnifiques par leur prestance et le luxe de leurs tenues, on comprend que le roi a une favorite, donc il n’aime pas la reine et brise les liens sacrés du mariage ce qui ne le rend pas exemplaire sur le plan moral.

 

II) La dimension ironique

a) Les portraits d’apparence

Madame de la Fayette insiste beaucoup sur le portrait physique des personnages m, avec la présence du champ lexical de la beauté : “La magnificence”, “un esprit surprenant, et cette incomparable beauté”, “parfaite”. Ensuite elle fait plusieurs références aux actions de la cour: “c’était tous les jours des parties de chasse et de paume, des ballets, des courses de bagues, ou de semblables divertissements.” Et au sens de la vue : “semblait”, “paraître”. De plus la Reine est associée à la dissimulation et au secret parce qu’elle sait que le roi a une favorite, mais par dignité et sens du devoir, elle dissimule ses sentiments et va jusqu’à couvrir la liaison de son mari : “Il semblait qu’elle souffrît sans peine l’attachement du roi pour la duchesse de Valentinois, et elle n’en témoignait aucune jalousie ; mais elle avait une si profonde dissimulation”.

b) La présentation dévalorisante des personnages

Ensuite Madame de la Fayette fait peu de référence au pouvoir, pourtant nous sommes au sein de la cour royal. Les personnages ne sont décrits que par leurs apparences, on ne connaît pas leurs caractères. De plus ce sont des portraits dévalorisants : “grand mère”, “cette incomparable beauté qui lui a été si funeste” et la reine n'est que très peu décrite. 

 

III) Un incipit original

a) L'esthétique précieuse 

Madame de la Fayette utilise le champ lexical de la préciosité : “dissimulation”, “difficile de juger”. Elle utilise aussi l'ironie à la fin du texte pour éviter de critiquer ouvertement de nobles personnages : “Ceux que je vais nommer étaient, en des manières différentes, l’ornement et l’admiration de leur siècle.” Nous pouvons remarquer aussi que la narratrice intervient dans de cet extrait pour juger ses personnages et donner son opinion : “et cette incomparable beauté qui lui a été si funeste”. 

 

b) Un incipit qui donne des informations à double sens 

Cet incipit brouille le lecteur car sous ces aspects de beauté et de magnificience le lecteur comprend que les personnages ne sont pas heureux. Cet incipit donne au lecteur l’impression d’assister à une représentation théâtrale car chaque personnage semble jouer son propre rôle à la perfection sans rien laisser transparaître de ses sentiments et de ses émotions. Cela est amplifié par l'utilisation des euphémismes (“quoiqu’elle eût passé la première jeunesse”, “Ce prince aimait le commerce des femmes”) et de l’ironie. 

Le portrait de Mademoiselle de Chartres.  Première partie, De « Il parut alors une beauté à la cour» à «son visage et sa personne étaient pleins de grâce et de charmes»

I) L’incarnation de la perfection

Le portrait physique de Mlle de Chartres reste vague. En effet, Madame de La Fayette insiste sur la beauté de la jeune fille avec la répétition des termes “beauté” ou “belle” aux lignes 1, 2, 3, 9, 18 et 26. Mais seuls quelques détails précis sont donnés à la fin du passage: “blancheur de son teint”, “ses cheveux blonds”, “ses traits étaient réguliers”. Mme de La Fayette privilégie donc les termes abstraits comme “éclat”, “grâce”, “charmes”. On remarque l’utilisation de termes hyperboliques comme les adjectifs “parfaite” et “grande”, soulignant la perfection de la jeune fille. Mlle de Chartres correspond aux critères de la beauté classique de l’époque (cheveux blonds, blancheur de teint, traits réguliers) qui sont des signes de noblesse. L’identité sociale de Mlle de Chartres est révélée dès la 1ère ligne avec le cadre spatial “à la cour”. On voit que pour Madame de La Fayette, la noblesse a énormément d’importance puisqu’elle insiste dessus: “Elle était de la même maison que le vidame de Chartres, et une des plus grandes héritières de France”, “Cette héritière était alors un des grands partis qu’il y eût en France”. L’utilisation de superlatifs “une des plus grandes”, “un des plus grands” souligne la haute noblesse de la jeune fille. Dès son apparition, la jeune fille est un objet de spectacle pour la cour, comme le prouve le champ lexical de la vision: “parut”, “attira les yeux”, “voir” que l’on peut associer à celui de l’admiration “admiration”, “surpris”.

 

II) Une éducation irréprochable 

L’éducation donnée par sa mère a consisté à la préparer à la vie mondaine et à devenir une honnête femme comme le prouvent le champ lexical de l’éducation: “éducation”, “cultiver son esprit”, “élévation” et la répétition du mot “vertu”. Le rôle de Madame de Chartres est particulièrement souligné dans cet extrait. Ainsi, elle devient le sujet de tous les verbes: “elle avait donné”, “elle travailla”, “elle songea”, “elle faisait”, “elle lui montrait”, “elle lui en apprenait”. L’anaphore “elle lui” insiste sur son implication dans l’éducation de sa fille. Madame de La Fayette prend soin de distinguer Madame de Chartres des autres mères de son époque avec les antithèses: “La plupart des mères” et “Madame de Chartres” (le pluriel d’un côté et le singulier de l’autre montre la différence). De plus, le rythme ternaire “le bien, la vertu, et le mérite” insiste sur ses qualités morales hors du commun. Madame de Chartres symbolise donc la perfection morale. 

 

III) Un portrait annonciateur du destin tragique

Madame de Chartres est consciente des qualités exceptionnelles de sa fille et a donc de l’ambition comme le souligne l’hyperbole “extrêmement glorieuse” qui montre son orgueil, lié à son rang élevé. Elle envisage donc un mariage exceptionnel comme le suggère l’antithèse: “plusieurs mariages” et “presque rien digne de sa fille”. Madame de La Fayette a fait de ce portrait une véritable ouverture tragique de son roman. Tous les éléments du piège tragique sont mis en place pour se refermer sur l’héroïne. Sa grande beauté devient une fatalité car elle devient le point de mire de la cour comme le souligne “les yeux de tout le monde”, “elle donna de l’admiration dans un lieu où l’on était si accoutumé à voir de belles personnes”. Pas une seule fois n’est fait mention de la possibilité d’un mariage d’amour. De plus, ce portrait montre des indices de fragilité. Elle est parfaitement innocente, ce qui est très dangereux dans un univers comme la cour. Enfin, les règles morales très strictes inculquées par sa mère vont empêcher la jeune fille d’être heureuse toute sa vie, car même après le décès de son mari, elle refusera la demande en mariage du Duc de Nemours en choisissant de rester fidèle à la mémoire de son défunt époux. 

 

Deuxième version de ce commentaire  :

L’idéal esthétique prôné par les Classiques se reflète dans le théâtre, mais aussi dans le genre romanesque. Avec la Princesse de Clèves (1678) parut d’abord anonymement, Madame de la Fayette signe un roman d’analyse représentatif de ce mouvement littéraire. A travers cette œuvre et son héroïne éponyme, l’auteur scrute ses contemporains.

Notre analyse répondra ainsi à la question suivante :  En quoi l’arrivée de la jeune fille à la cour permet-elle à l’auteur de proposer une vision de son époque ?

Nous nous intéresserons dans un premier temps à l’art du portrait développé dans ces quelques lignes qui débute le roman. Nous étudierons ensuite la figure de la mère, qui semble se confondre avec l’auteur.

 

 I )  L’art du portrait

1) Une description physique élogieuse  

Le portrait brossé par Madame de La Fayette présente la jeune Mademoiselle de Chartres comme l’incarnation de la perfection notamment par l’utilisation d’une métonymie « une beauté » (l.1)

 Dans cet incipit le cadre est posé « la cour » (l.1), et l’adverbe « alors » (l.1) fixe un moment.

 Ce qui nous frappe dans la description c’est la tournure impersonnelle « Il parut alors une beauté à la cour » (l.1) où l’article indéfini « une » suscite le mystère sur son identité. (+ « Il parut » l’héroïne apparaît comme dans un conte de fée)

 Elle incite l’admiration de tous, tous les regards convergent vers elle « qui attira les yeux de tout le monde » (l.1), « elle donna de l’admiration » (l.2-3)

 Pour laisser planer le mystère l’héroïne n’est nommée que directement à la fin du texte « il fut surpris de la grande beauté de mademoiselle de Chartres » (l.28-29). (mais on connaît son identité au milieu du texte : Mlle de Chartres)

 Madame de La Fayette met ainsi son héroïne en valeur, dévoilant petit à petit ses multiples qualités.

 L’hyperbole « beauté parfaite » (l.2) théâtralise la scène tout en appuyant sur la beauté de cette jeune femme.

 Cette jeune femme répond aux critères de beauté de l’époque : « blancheur de son teint » (l.30), « cheveux blonds » (l.30)

 Son rang social est tout aussi prestigieux.

 

2) Un rang social prestigieux

Le superlatif « une des plus grandes héritières de France » (l.4-5) nous indique son appartenance à la noblesse. En effet « héritière » montre qu’elle récupère le titre de noble, par ailleurs cela souligne sa richesse et sa jeunesse. (+utilisation de la 3° personne du singulier pour nous renseigner sur son rang social)

 Elle appartient également à la famille du « vidame de Chartres » (l.4)

 Ainsi nous comprenons l’importance du rang social mais aussi du physique pour pouvoir rentrer à la cour.

 Pour évoluer ans cette sphère l’héroïne se doit d’être irréprochable.

 

3) Des traits moraux remarquables

Ce texte propose une analepse, on nous raconte le passé de Mademoiselle de Chartres afin que l’on puisse cerner sa personnalité.

 Cette héroïne est élevée dans un milieu féminin, « son père était mort jeune » (l.5).

 Elle passe un certain temps en dehors de la cour pour en être préservée. (« elle avait passé plusieurs années sans revenir à la cour » (l.7-8) = la mère et par conséquent la fille)

 Cette jeune fille va être amené à avoir autant d’esprit que de beauté « elle ne travailla pas seulement à cultiver son esprit et sa beauté ; elle songea aussi à lui donner de la vertu et à la lui rendre aimable » (l.9-10-11).

 Cette perfection en tout point, Mademoiselle de Chartres la doit à sa mère.

 

 II)   La figure de la mère 

1) Une conception singulière de l’éducation

La figure maternelle est mentionnée comme étant à l’origine de l’éducation de Mademoiselle de Chartres.

 Madame de Chartres est une femme méritante et courage : elle abandonne la vie mondaine et privilégie avant tout sa fille = abnégation de la part de cette mère qui met sa vie entre parenthèse pour élever sa fille. (A l’époque, les jeunes filles recevaient une éducation du couvent ou d’un précepteur, on comprend donc toute l’originalité de l’implication de Madame de Chartres)

 La tournure négative « elle ne travailla pas seulement » (l.9) souligne l’énergie déployée par la mère pour donner une éducation complète à sa fille. Education rendu possible grâce aux qualités de la mère mises en relief par une énumération « sa femme, dont le bien, la vertu et le mérite étaient extraordinaires » (l.6-7) (+ rythme ternaire) ainsi que par l’utilisation de superlatif : « extraordinaire » (l.7) et « extrêmement » (l.26).

 Son éducation n’est pas fondée sur la contrainte mais bien sur la franchise et sur la confiance réciproque. C’est ainsi que Madame de Chartres aborde avec sa fille tous les sujets afin de la persuader et non de la contraindre.

 Cette femme vertueuse n’en est pas moins lucide sur la cour.

 

2) Des préceptes pessimistes

Si cette femme se distingue de la majorité des mères « La plupart des mères s’imaginent […] Madame de Chartres avait une opinion opposée » (l.11 à 13), c’est par sa façon de concevoir l’éducation de sa fille.

 A travers Madame de Chartres, c’est en réalité Madame de La Fayette qui nous transmet un programme éducatif original pour élever les jeunes filles.

 En effet à travers ses paroles « elle faisait souvent à sa fille des peintures de l’amour ; […] elle lui en apprenait de dangereux » (l.13 à 15) Madame de Chartres vise à montrer à sa fille les dangers de la vie et plus particulièrement de l’amour. (+ anaphore « elle » (l.13 à 15) pour insister sur cette mise en garde)

 On note par ailleurs une antithèse entre les adjectifs « agréable » (l.14) et « dangereux » (l.15) pour montrer les risques que peuvent engendrer l’amour.

 On compte un certain nombre de termes qui montrent que cette femme explique avec lucidité les offres de la séduction à sa fille : « peintures » (l.14), « montrait » (l.14), « apprenait » (l.15), « contait » (l.16) « faisait voir » (l.17)

 Ces mots sont francs : « tromperies » (l.16), « infidélité » (l.16), « peu de sincérité » (l.16), elle s’attarde sur les souffrances de la passion.

 Elle lui expose ainsi les problèmes auxquels les femmes se heurtent mais aussi son devoir de femme honnête.

 Madame de La Fayette critique implicitement l’éducation traditionnelle des filles qui repose sur l’évitement de nombreux sujets, dont l’amour et la galanterie.

Cette éducation menée par Madame de Chartres reprend des débats fréquents concernant l’amour à cette époque. (Faut-il oui ou non parler d’amour aux jeunes filles ?)

 Cette méfiance suggérée par l’auteur au travers du discours maternel est renforcé par le discours de la vertu

 

3) Un discours de la vertu

La mère exprime un discours mesuré : « elle faisait souvent à sa fille » (l.13), « elle lui faisait voir d’un autre côté » (l.17-18).

 Cette vertu s’oppose à l’attitude de la cour, milieu dans lequel les femmes sont souvent entraînées aux malheurs domestiques.

 La fragilité de Mademoiselle de Chartres : « extrême jeunesse » (l.25) renforce l’importance des préceptes de sa mère, mère qui expose la condition du bonheur : « aimer son mari et en être aimé » (l.23). Par ailleurs, l’utilisation du champ lexical de l’honnêteté et de la vertu : « honnête femme » (l.18), « conserver cette vertu » (l.21), « défiance » (l.21) dénonce les dérives de ce milieu, auxquelles s’explose les femmes.

 L’usage d’un adjectif hyperbolique « extrême défiance » (l.21) montrent qu’une femme peut être faible mais qu’elle doit résister à la tentation. Madame de Chartres oppose ainsi l’amour et la vertu, les présentant comme deux forces ne pouvant être concilier que dans l’amour conjugal.

 

 Conclusion  :

Le portrait de la jeune héroïne dressé par l’auteur est des plus élogieux. Cela laisse penser que celle-ci a une éducation exemplaire bien que singulière pour l’époque dont l’auteur semble admiratif. En effet, Madame de La Fayette signe une œuvre réaliste dont les figures principales sont des femmes vertueuses et lucides.

L’aura qui entoure Mademoiselle de La Fayette dans l’incipit se recouvre dans la scène du bal = similitudes entre l’arrivée à la cour et l’arrivée au bal.

ETUDE LINEAIRE

 

INTRODUCTION

Madame de la Fayette dans son siècle : petite noblesse. Siècle de Louis XIV et du classicisme (règles).

Raffinement de sentiments, exaltation de la femme, « galanterie » amoureuse.

La princesse de Clèves dans l’œuvre de Mme de Lafayette : publiée en 1678. L’action se passe vers 1550 – 1560. Son œuvre la plus célèbre. Énorme succès, mais aussi nombreuses controverses. Œuvre qui fonde le

roman moderne jusqu’au XXème siècle.

L’extrait dans l’œuvre : Vient après une présentation de la cour d’Henri II : à la fois des courtisans admirables et des intrigues épouvantables. Ce passage, se situe au début de l’histoire : l’arrivée de Melle de Chartres est décrite. Le passage se situe juste après le décès de la reine d’Angleterre, et après cette scène Melle de Chartres va rencontrer Monsieur de Clèves.

LECTURE

Problématique : Quels sont les atouts de l’héroïne quand elle arrive à la cour ?

Annonce du plan :

I. Le portrait d’un personnage exceptionnel.

II. Une éducation soignée.

III. À travers ce portrait idéal, l’auteure exprime ses conceptions.

 

I. Lignes 1 à 8 : présentation à la cour : portrait d’un personnage exceptionnel

Tonalité épidictique : Description hyperbolique d’une cour pleine de

gens admirables et exceptionnels, mais quand Melle de Chartres (future

princesse de Clèves) paraît, tout le monde l’admire → degré supérieur

d’admiration : LPC représente l’excellence de l’excellence.

Elle n’est pas nommée, sauf c’est « une beauté » l. 1, intensifié par

l’adjectif « parfaite » // divinité parmi les divinités // Vénus, Aphrodite.

Portrait mélioratif.

Elle a tout : beauté, jeunesse (16 ans, l. 25), la naissance « une des plus

grandes héritières », la bonne éducation, la richesse = bon parti. Définie par son héritage et sa lignée, non par ses qualités personnelles. Ainsi peu d’informations sur son tempérament. Portrait imprécis.

Sa mère a le droit aux mêmes éloges, moins la jeunesse et la beauté.

On change de temps et le récit est au PQP. Le PQP a ici une valeur d’antériorité. Il s’agit d’une analepse (flashback).

● L’ordre chronologique est bouleversé.

● Le récit est fait aux temps du passé : passé-simple, imparfait,

PQP, etc. On voit que le roman historique, qui raconte l’aventure d’une héroïne, est aussi le moyen pour l’auteure de transmettre ses conceptions personnelles.

Dans cette partie la question des origines et de la mort de son père sont abordées. Elle s'exclut de la cour pour préserver l’éducation de sa fille et pour faire son deuil. Elle ne cherche pas à se remarier. C’est singulier.

Orpheline de père, la princesse est éduquée par une femme : éducation

entièrement féministe.

On peut y voir une annonce du destin de LPC qui elle-même va perdre son mari et s’exclure à son tour de la cour.

 

II. Lignes 8 à 24 : une éducation soignée

Madame de Lafayette → auteure, double de Mme de Chartres. Donc éducation de Mme de Chartres = conceptions de l’auteure qui mettra son héroïne si parfaite à l’épreuve des tentations de la cour.

Voici ce qu’il faut pour réussir l’éducation d’une jeune fille :

Cf. “docere” : instruire, impératif du classicisme

● « cultiver son esprit et sa beauté », pour plaire en société,

● « lui donner de la vertu et [...] la lui rendre aimable » Education morale.

● Parler franchement des dangers de la vie ;

● Mettre en garde contre les dangers de l’amour et des hommes

→ éducation sentimentale

Mais on trouve aussi des phrases au présent de narration qui témoignent

de ce que pense la narratrice au moment où elle écrit → présents de

vérité générale :

 

o « la plupart des mères s’imaginent » ;

o « (elle lui montrait) ce qu’il y a d’agréable »

o « les malheurs domestiques où plongent les engagements »

o « ce qui seul peut faire le bonheur d’une femme, qui est... »

Démarche scientifique « persuader » parallèles, analogies, exemples.

Emploi d’un imparfait à valeur fréquentielle renforcé par l’adverbe « souvent » + « plus aisément » = la pédagogie est une affaire de répétition.

Antithèse « agréable » vs « dangereux »

Enumération des malheurs liés aux hommes : dresse un portrait péjoratif

Enseigner le bonheur du couple→ éducation sentimentale.

Il ne s’agit pas de contraindre, mais de convaincre par la douceur. Elle

dit la vérité tout en mettant en garde. Vocabulaire mélioratif autour de

la vertu.

● Beauté physique = beauté intérieure → esprit + beauté se cultivent ensemble.

● Éducation exigeante : garder le contrôle de soi en se méfiant des sentiments.

Vision du monde négative et pessimiste → amour hors mariage = danger ; hommes = infidèles ; femmes = succombent facilement.

Enseigner « une extrême défiance de soi-même » → éducation du

caractère.

→ L’auteure dresse un programme éducatif pour les jeunes filles de son

temps :

 

o Éducation loin de la cour.

o D’abord une éducation parfaite puis mise à l’épreuve de

la cour : cela permet de juger la qualité de l’éducation.

o Education essentiellement moraliste.

 

Enseigner « une extrême défiance de soi-même » → éducation du

caractère.

→ L’auteure dresse un programme éducatif pour les jeunes filles de son temps :

 

o Éducation loin de la cour.

o D’abord une éducation parfaite puis mise à l’épreuve de la cour : cela permet de juger la qualité de l’éducation.

o Education essentiellement moraliste.

 

III. Lignes 24 à la fin : l’auteure exprime ses conceptions

Les enjeux du roman sont posés : champ lexical du mariage + emploi de la conjonction « quoique » qui appelle le subjonctif et marque une nuance concessive : 16 ans !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! MAIS elle a eu une éducation exceptionnelle donc Mme de Lafayette la dote d’une certaine maturité.

L’intrigue va concerner la réussite de l’éducation de Mme de Chartres dans le mariage de sa fille.

Héroïne qui se révèle très progressivement ce qui la valorise. Qualités qui s’ajoutent les unes aux autres → figure idéale, sans aucune ombre.

● Décrite de façon très générale : on parle de « son teint », de « ses traits », elle est pleine « de grâce et de charmes ». Aux lecteurs de l’imaginer et de l’idéaliser.

● Le lecteur découvre à travers les yeux des courtisans (l. 1 à 25) puis du vidame (l. 26 à 29). Pour les courtisans elle est mystère, le vidame est subjugué : « surpris » l. 26.

 

CONCLUSION : La narratrice, qui avance à couvert derrière Mme de Chartres, raconte aux lecteurs. Elle présente aux lecteurs un nouveau personnage qui sera manifestement l’héroïne du roman. Elle nous la présente telle qu’elle apparaît au moment de la narration, mais elle nous renseigne aussi sur son passé, les rapports avec sa mère, son éducation, etc.

La première rencontre entre Mme de Clèves et M. de Nemours au bal. Première partie, De «Elle passa tout le jour des fiançailles chez elle à se parer» à «vous le connaissez déjà sans l'avoir jamais vu»

I) La mise en scène d'un coup de foudre

L'arrivée de Monsieur de Nemours au bal est mise en valeur par la description du bruit près de la porte : « il se fit un assez grand bruit vers la porte de la salle, comme de quelqu'un qui entrait, et à qui on faisait place ». Les autres invités lui font de la place donc le lecteur comprend que c'est un un personnage important. Il est ensuite décrit comme éblouissant, d’une beauté exceptionnelle relevée par l'élégance de sa tenue de bal : « Ce prince était fait d'une sorte qu'il parut difficile de n'être pas surprise de le voir quand on ne l'avait jamais vu, surtout ce soir-là, où le soin qu'il avait pris de se parer augmentait encore l'air brillant qui était dans sa personne ». L'action à proprement parler étant un possible en raison des conventions sociales, cette scène de rencontre est entièrement structurée par les jeux de regards. Tout d'abord par les regards des invités du bal qui sont éblouis en premier par la beauté de la princesse de Clèves, puis par celle de monsieur de Nemours. Puis par les regards croisés des deux protagonistes qui ressentent un véritable coup de foudre : « Monsieur de Nemours fut tellement surpris de sa beauté que, lorsqu'il fut proche d'elle, et qu'elle lui fit la révérence, il ne put s'empêcher de donner des marques de son admiration ». Cette rencontre est véritablement mise en scène par le roi qui les oblige à danser ensemble : « le Roi lui cria de prendre celui qui arrivait », et par la reine dauphine qui les oblige à se présenter l’un à l’autre : « Ils les appelèrent quand ils eurent fini, sans leur laisser le loisir de parler à personne, et leur demandèrent s'ils n'avaient pas bien envie de savoir qui ils étaient, et s'ils ne s'en doutaient point ». Les sentiments se lisent dans les regards plus que dans les paroles, même si monsieur de Nemours déclare son amour à Madame de Clèves dans une litote : «Pour moi […] je n'ai plus d'incertitude ».

 

II) Amour et jeu social

La rencontre se fait dans le cadre féerique d'un bal. Les costumes, les parures et la lumière offre un décor propice au coup de foudre : « Elle passa tout le jour des fiançailles chez elle à se parer, pour se trouver le soir au bal et au festin royal qui se faisait au Louvre ». Le rois et les reines dirigent les danseurs comme des pions sur un échiquier : « le Roi lui cria de prendre celui qui arrivait ». L'intervention de la reine dauphine met la princesse dans l'embarras : « Je vous assure, Madame, reprit Madame de Clèves qui paraissait un peu embarrassée, que je ne devine pas si bien que vous pensez », parce qu'elle dit implicitement que la princesse est séduite par le duc de Nemours parce que sa réputation de très bel homme le précède : « Vous devinez fort bien, répondit Madame la Dauphine ; et il y a même quelque chose d'obligeant pour Monsieur de Nemours à ne vouloir pas avouer que vous le connaissez déjà sans l'avoir jamais vu. »

La dernière entrevue entre Mme de Chartres et Mme de Clèves. Première partie, De «Madame de Chartres empira si considérablement, que l'on commença à désespérer de sa vie» à «elle ne voulut plus revoir sa fille, qui était la seule chose à quoi elle se sentait attachée»

Introduction : Au XVIIe siècle, le personnage de Roman est confronté à un dilemme entre vice et vertu, c’est le cas de La princesse de Clèves de Madame de Lafayette. Dans cet extrait, Madame de Chartres, la mère de Mme de Clèves est mourante et à travers un long discours, la met en garde contre la passion qu’elle éprouve pour Monsieur de Nemours. Cet extrait nous invite à nous questionner sur l’influence qu’a Madame de Chartres sur sa fille et nous amène à la problématique suivante : Comment Madame de Chartres influence-t-elle la vie de sa fille? Pour ce faire, nous allons étudier le discours de Mme de Chartres ainsi que le dilemme entre vice et vertu de Mme de Clèves.

 

I) Discours de Mme de Chartres

Madame de Chartres met sa fille devant ses responsabilités. On remarque le ton judiciaire et accusateur de Madame de Chartres, qui emploie des phrases déclaratives, ainsi que des répliques enchaînées. Elle fait l’apologie de la vertu, car pour elle la réputation est plus importante que le bonheur de sa fille. Comme Madame de Chartres mourante, sa déclaration sonne comme une dernière volonté, et la fait culpabiliser “mais si ce malheur vous doit arriver, je reçois la mort avec joie, pour n'en être pas le témoin.” . Incite sa fille à rester malheureuse avec son mari, elle est prisonnière de sa relation, car elle pense qu’elle regrettera son acte par la suite. Elle considère que sa fille est dans une situation critique “au bord du précipice”, “il faut de grands efforts et de grandes violences pour vous retenir.” “Ayez de la force et du courage,” Selon elle, sa fille doit lutter contre sa passion et s’interdire d’être heureuse pour rester dans les conventions, c’est une vision janséniste de l’existence. Madame de Chartres ne voulant plus voir sa fille, renforce son sentiment de culpabilité. Elle ne laisse pas sa fille parler, et préfère arrêter la conversation pour plusieurs raisons : elle ne veut pas la faire souffrir davantage mais surtout elle ne veut pas risquer de sombrer dans la faiblesse “elle ne songea plus qu’à se préparer à sa mort” (jansénisme) et de donner un mauvais exemple à sa fille : “Adieu, ma fille, lui dit-elle, finissons une conversation qui nous attendrit trop l'une et l'autre,” “sans vouloir l'écouter, ni parler davantage”.

Selon Madame de Chartres, sa vie sera plus douce si elle renonce à l’amour : “ils seront plus doux dans les suites que les malheurs d'une galanterie.” Ce discours peut également laisser penser que Mme de Chartres est passée par la même épreuve, et ne fait qu’appliquer les conventions qu’on lui a imposées étant jeune.

 

II) Dilemme entre passion et vertu

Ce texte est composé de trois mouvements, de la ligne 1249 à 1253 on annonce la mort prochaine de Mme de Chartres, de la ligne 1254 à 1277 Mme de Chartres donne un dernier enseignement moral à sa fille, de la ligne 1278 0 1290 nous voyons les adieux de Mme de Chartres à sa fille. Le mouvement qui occupe la plus grande place est le deuxième car le but de Madame de La Fayette dans ce roman est d’enseigner aux jeunes filles les principes moraux du jansénisme qui leur permettront de résister à la tentation de l’adultère. On remarque l’importance du jansénisme dans les paroles et l’attitude de Mme de Chartres qui manie encore la litote au moment de dire adieu à sa fille, la seule personne qu’elle aime Madame de Chartres incite et force presque sa fille à suivre les conventions pour sauver son honneur, ce qui fait culpabiliser la Princesse de Clèves, luttant contre sa passion pour monsieur de Nemours :“il faut de grands efforts et de grandes violences pour vous retenir.”  Dans cette scène pathétique, nous pouvons relever le champ lexical de la douleur et des larmes qui permet de mettre en valeurs l'aspect dramatique de la scène : “désespérer de sa vie”, “quitter”, “déplaisir que j’ai de vous quitter”, “fondait en larmes”, “Adieu”, “mort”. La Princesse de Clèves est face à un dilemme : elle doit se retenir d’aimer pour préserver sa réputation, comme le souligne l’anaphore de l’impératif “Songez ce que vous vous devez à vous-même, et pensez que vous allez perdre cette réputation que vous vous êtes acquise, et que je vous ai tant souhaitée”. Très attachée à sa mère et touchée par son discours, on comprend qu’elle va se plier à sa volonté : “Madame de Clèves fondait en larmes sur la main de sa mère, qu'elle tenait serrée entre les siennes”. Sa mère veut lui prouver que suivre l’homme qu’elle aime n’est pas le chemin qu’elle exige pour sa fille. Cette déclaration apparaît comme une dernière volonté, et renforce la pression psychologique exercée sur sa fille : “Madame de Clèves sortit de la chambre de sa mère en l'état que l'on peut s'imaginer”.  

 

Conclusion : Ainsi, nous avons pu étudier l’influence de Madame de Chartres sur sa fille grâce à son discours judiciaire et accusateur pour mettre en garde sa fille contre sa passion amoureuse, qui est face à un dilemme opposant vice et vertu. Malgré les sentiments de v de Clèves, elle va se résigner à écouter sa mère, qui lui impose sous la forme d’une dernière volonté, ses exigences, ainsi que les conventions sociales et l’incite lutter contre sa passion pour au final, avoir une vie triste et monotone, prisonnière d’une relation non souhaitée.

La lettre. Deuxième partie, de «Mme de Clèves lut cette lettre et la relut plusieurs fois» à « entièrement guérie de l’inclination qu’elle avait pour lui».

I) Un soliloque

L’utilisation du discours indirect libre et le point de vue interne permettent de percevoir les pensées de Madame de Clèves (« quelles réflexions sur les conseils que sa mère lui avait donnés !») Elle se méprend totalement au sujet de cette lettre mais elle est tellement prisonnière de ses propres sentiments qu’elle interprète ce qu’elle lit en fonction de ce qu’elle ressent («Elle voyait, par la fin de la lettre, que cette personne se croyait aimée»). La plupart des verbes sont des verbes de pensée, il n’y a pas d’action, tout se déroule dans la psychologie du personnage.

 

II) Les tourments de la jalousie

Madame de Clèves est agitée de sentiments contradictoires, tiraillée entre l’amour et la jalousie. Elle est déçue et accuse le Duc de Nemours sans avoir aucune preuve, se fiant uniquement à ses émotions («et ce mal, qu’elle trouvait si insupportable, était la jalousie avec toutes les horreurs dont elle peut être accompagnée»). Ainsi cet extrait est typique du roman d’analyse qui s’attache à décrire les élans de la passion amoureuse et ses contradictions.

Les progrès de la passion amoureuse.  Troisième partie, de «Elle avait ignoré jusqu’alors» à «la fausse lettre du vidame».

Cet extrait en particulier fait de La Princesse de Clèves le premier roman d’analyse psychologique. En effet la focalisation interne permet au lecteur de connaître les pensées intimes du personnage en proie aux affres de la passion amoureuse : «Je suis vaincue et surmontée par une inclination qui m’entraîne malgré moi». Les phrases interrogatives au style direct retranscrivent le monologue intérieur de la Princesse placée face à un dilemme cornélien car elle doit choisir entre son amour pour le Duc de Nemours et son honneur, entre une vie de passion et une vie paisible : «Et veux-je enfin m’exposer aux cruels repentirs et aux mortelles douleurs que donne l’amour ?» L’emploi du plus-que-parfait indique que le personnage analyse des événements survenus dans son propre passé, lui-même antérieur au temps de la narration retranscrite au passé simple. Cet emploi du plus-que-parfait indique également que le récit est fait en focalisation interne, adoptant ainsi le point de vue du personnage qui délibère. L’épisode de la lettre modifie la façon dont Madame de Clèves envisage ses sentiments : «Elle avait ignoré jusqu’alors les inquiétudes mortelles de la défiance et de la jalousie». Elle essaye de se convaincre qu’en s’éloignant de Monsieur de Nemours son amour diminuera et qu’elle finira par l’oublier : «Il faut m’arracher à la présence de Monsieur de Nemours ; il faut aller à la campagne». Enfin, la Princesse finit par envisager d’avouer son amour à son mari, scène qui sera le point culminant du roman : «et si Monsieur de Clèves s’opiniâtre à l’empêcher ou à en vouloir les raisons, peut-être lui en ferai-je le mal, et à moi-même aussi, de les lui apprendre». Elle pressent que cet aveu aura des conséquences dramatiques, on peut donc voir dans ce passage une prolepse de la fin du roman.

La scène de l’aveu à Monsieur de Clèves. Troisième partie, De « Il la pressa longtemps de les lui apprendre » à «  je ne réponds pas comme je dois à un procédé comme le vôtre »

La Princesse provoque l’inquiétude de son mari par son refus de justifier sa décision de se retirer de la cour. Elle ne se décide à parler que lorsque son mari a deviné qu’elle en aime un autre. La princesse de Clèves justifie son aveu par « l’amitié et l’estime » qu’elle éprouve pour son mari. Cette scène est extraordinaire et complètement invraisemblable. En effet, une jeune femme mariée de force à un homme beaucoup plus âgé qu’elle et pour lequel elle n’éprouve ni attirance physique ni amour tombe éperdument amoureuse d’un homme de son âge, beau, élégant et subtil, mais elle trouve la force de se refuser à lui en se retirant du monde et d’avouer à son mari une faute qu’elle n’a pas commise et qui le fera mourir de chagrin. Il est normal que le lecteur du XXIème siècle reste perplexe devant tant d’invraisemblance. Les gestes et attitudes des personnages sont exagérés, ils pleurent, se jettent à genoux, semblent « mourir de douleur » alors qu’aucune faute n’a été commise. Cette scène est tragique puisque les personnages sont victimes de leur destin : la princesse est prise au piège de son mariage arrangé et n’a d’autre choix que de sacrifier son amour sur l’autel des conventions sociales. Nous sommes ici bien loin d’Emma Bovary, une héroïne tellement plus humaine et proche de nous.

La scène de jalousie. Troisième partie, De «Il alla d'abord dans la chambre de sa femme» à «Enfin il n'y a plus en moi ni de calme ni de raison.»

I) Monsieur de Clèves

a) Un mari jaloux

Dans cette scène, nous pouvons voir que Monsieur de Clèves est un mari jaloux, “il lui demanda, en tremblant”. Cela montre son émotion et le fait qu’il soit en colère, mais aussi triste que sa femme ne soit pas amoureuse de lui. Une ponctuation émotive traduit la jalousie et l'émotion de Monsieur de Clèves, et aussi un champ lexical de la tristesse, “malheureux”. Nous pouvons voir que ce personnage a tellement de sentiments envers sa femme, (“Je vous adore, je vous hais”) qu’il perd la raison et il n’arrive pas a comprendre le comportement de sa femme. Le registre dominant dans les paroles de Monsieur de Clèves est le registre tragique puisque c’est un personnage dominé par la passion.

 

b) Un mari amoureux

Cependant, Monsieur de Clèves n’est pas seulement un mari jaloux, mais aussi un mari amoureux. Nous pouvons voir que Monsieur de Clèves a tant d’amour pour sa femme, qu’il est presque malade de cet amour et cette tristesse, “un ton qui marquait son affliction”.

“Vous êtes ma femme, je vous aime comme ma maîtresse”, montre que Monsieur de Clèves est très amoureux de sa femme, car à cette époque, un homme épousait une femme pour sa fortune et son rang, et il avait une maîtresse qu’il aimait vraiment. Mais ici nous avons une situation remarquable car Monsieur de Clèves est amoureux de sa femme, et il l’a épousée par amour et non pour une raison sociale. 

 

II) Madame de Clèves

a) Une femme passionnée

Madame de Clèves est aussi un personnage passionné, comme son mari. Nous pouvons voir qu’elle est amoureuse d’un autre homme, Monsieur de Nemours, mais elle refuse de voir cet homme car en sa présence elle ne maîtrise plus ses transports qui deviennent visibles, “Je ne l'ai point vu, en effet”. Madame de Clèves se montre passionnée dans cette scène de jalousie et de dispute, et se défend contre les reproches de son mari, qu’elle juge infondés : “que vous pussiez me faire des reproches de ne l'avoir pas vu.” 

 

b) Un personnage tout en retenue

Dans ce roman précieux, les conventions sociales sont au coeur des enjeux. Aussi, même si Madame de Clèves est passionnée, contrairement à son mari, en tant que femme elle a le devoir de se retenir par dignité et parle peu, ce qui lui évite de trop dévoiler sa grande émotion. Nous pouvons voir que dans le dialogue, Madame de Clèves ne dit que quelques phrases, tandis que son mari a de longues répliques. De plus, elle ne parle pas beaucoup par peur de la réaction de Monsieur de Clèves dans cette scène de dispute très théâtrale. Madame de Clèves est un personnage tragique, car en tant que femme, il lui est impossible de vivre son amour dans cette société où les sentiments doivent être étouffés. 

Le vol du portrait. « Il y avait longtemps que M. de Nemours souhaitait d’avoir le portrait de Mme de Clèves ... »

INTRODUCTION

Madame de la Fayette dans son siècle : petite noblesse. Siècle de Louis XIV et du classicisme (règles).

Raffinement de sentiments, exaltation de la femme, « galanterie » amoureuse. La princesse de Clèves dans l’œuvre de Mme de Lafayette : publiée en 1678. L’action se passe vers 1550 – 1560. Son œuvre la plus célèbre. Énorme succès, mais aussi nombreuses controverses. Œuvre qui fonde le roman moderne jusqu’au XXème siècle. L’extrait dans l’œuvre : Marie Stuart, la reine Dauphine, envoie à sa mère en Angleterre des portraits de toute la cour de France. Lorsque vient le tour de Mme de Clèves, elle se

déplace chez cette dernière avec le peintre. M. de Nemours saisit ce prétexte pour voir la princesse. Lors de la séance il profite des conversations pour voler un petit portrait de LPC apporté à titre de comparaison. Mme de Clèves observe le manège de M. de Nemours. Elle s’est avoué son inclination pour Nemours, pense être l’objet de sa passion mais n’en a pas reçu de preuve évidente.

LECTURE

Problématique : Comment l’héroïne est-elle tiraillée entre passion et raison ?

Annonce du plan :

I. Lignes 1 à « devant elle » : la préméditation

II. « Mme de Clèves » à « davantage » : Un jeu de regards complices.

 

I. Lignes 1 à : la préméditation

Puissance symbolique : vouloir posséder l’image de l’être aimé est un signe amoureux, cependant le portrait ici ne sera pas l’objet d’un vrai échange. Imparfait + Adverbe de durée : indique la préméditation de M. de Nemours. La patience du chasseur.

Passage au passé simple + « lorsque » : il saisit l’opportunité et passe à l’action. Jeu des passions qui dévorent Nemours.

Les verbes de pensées indiquent qu’il est trompé par ses sens « pensa », « croyait ».

Théâtralisation de la scène : scène « lieu » + acteurs « personnes » + intrigue «soupçonné».

La chambre de la Dauphine est un des cœurs de la cour. Les discussions sont mondaines : monde d’apparence, la parole dissimule, le regard seul permet de découvrir, d’interpréter, de comprendre. Atmosphère de conspiration « parlait bas ».

Confidences amoureuses certainement. Organisation spatiale précise : jeu théâtral mis en place.

 

II. Un jeu de regards complices

ESPACE SCÉNIQUE : schéma théâtral comique femme / amant / mari trompé. Tout est en demi-teinte donc LPC va percevoir des signes fugitifs difficiles à interpréter.

Les acteurs sont positionnés, figés « sans tourner la tête » par les contraintes de la bienséance « à demi fermé », donc les regards prennent la relève. Champ lexical de la vue. « le dos contre la table » : attitude faussement désinvolte de Nemours, contredite par l’adverbe « adroitement ». Vol savamment calculé.

LPC est troublée : réseau de locutions adverbiales négatives indiquent la confusion dans laquelle elle se trouve. Elle semble prise de court.

Trouble confirmé par le champ lexical de l’ouïe qui prend la place de la vue « écoutait », « demanda tout haut » // « regardait ». LPC observe et analyse par la suite. Elle est passive, interdite, réceptive plutôt qu’émettrice.

En dérobant le portrait sans vouloir être vu Nemours se contente de la jouissance de posséder l’image de LPC, possession physique par objet interposé qui révèle un certain fétichisme. Le narrateur omniscient évoque la passion amoureuse par l’emploi d’« attachés » (// expression : attache affective) informe d’abord le lecteur des pensées « il pensa »de Nemours pris en flagrant délit.

Expression d’un amour indirect. Style précieux qui exprime des choses simples par des formules raffinées et souvent complexes. En témoigne la construction syntaxique complexe : « il pensa [qu'il n'était pas impossible [qu'elle eût vu ce [qu'il venait de

faire] ] ]. Enchâssement syntaxique de 3 propositions subordonnées conjonctives = préciosité, goût pour la sophistication langagière = démontre la complexité de l’âme humaine, labyrinthe. Le temps de la description « se tourna ; rencontra » transcrit ici le temps de la réflexion de LPC.

Narrateur informe transmet ensuite les pensées de LPC. Enchainement complexe du raisonnement de la LPC : Dilemme « embarrassée » imposé par la bienséance entre raison « la raison voulait » et passion « les sentiments que ce prince ». Refuse de reconnaître une réciprocité des sentiments. Forme de fuite.

Argument 1 : Tentative de protéger Nemours de la reconnaissance publique de sentiments, d’un amour adultère.

Argument 2 : mettre en mot c’est mettre en vie, donc c’est reconnaître l’existence de sentiments que sa raison refuse de reconnaître « quasi l'engager à lui parler de sa passion » ; l’adverbe « quasi » annonce la faille du raisonnement de LPC.

« enfin » marque l’aboutissement du raisonnement calculateur de LPC.

Champ lexical de la raison : après tergiversations LPC choisit de fermer les yeux. Se ment à elle-même en choisissant de ne pas dénoncer Nemours : qui ne dit mot consent. Évaluation rationnelle des risques.

Narcissisme de LPC qui est flattée du geste de Nemours.

Le portrait appartient au mari, le vol a lieu en sa présence, sous les yeux de sa femme, cet acte prend symboliquement les caractéristiques d’un viol. La sensualité de cet acte n’échappe pas à la princesse qui jouit de se savoir possédée, qui s’avoue être « bien aise de lui accorder une faveur » donnant ainsi son consentement. Elle subtilisera par la suite la canne de Nemours et fera copier le tableau contenant le portrait du

duc.

Jusqu’à ce que son regard rencontre celui de Nemours, LPC semble avoir toujours fait l’impossible pour ne pas émettre de signe de passion.

Pour la première fois elle est vue en train de voir. Regard volé par Nemours et qui va trahir l’intérêt qu’elle lui porte. Nemours : expert des jeux de séduction. Interprète immédiatement le trouble « son embarras ». Il vient résoudre l’ambiguïté des signes. Il oblige LPC à lui faire consciemment, ouvertement la faveur qu’elle avait secrètement

décidé de lui faire. Nemours transforme le silence de LPC en complicité forcée qui donne d’elle l’image d’une femme infidèle par la pensée presque aussi coupable que si l’adultère avait été réellement commis.

Nemours avoue ses sentiments en demandant que son geste soit excusé car passion trop forte et donc irrépressible. Suggère que l’intensité de son amour pour LPC ne peut être maîtrisée et lui donne une certaine noblesse « j’ai osé faire » courage. Mais aussi fuite précipitée qui ne donne pas l’occasion à LPC de réagir.

 

CONCLUSION : récapituler les axes + ouverture sur un autre passage du roman (point précis de comparaison).

Deux amants qui utilisent des objets-signes pour exprimer leur amour. S’entourent d’objets, de regard, de pensées secrètes, de fantasmes : bulle amoureuse égoïste où ils cultivent leur passion. La scène du portrait semble dans ce sens déterminer l’artificialité, la vanité d’un amour sans échange (absence de communication directe depuis leur rencontre jusqu’à la mort du prince de Clèves ; se découvrent et se comprennent en émettant volontairement ou non des signes, messages que l’autre est avide de déchiffrer) que les personnages se résignent à vivre par objets interposés.

La scène des rubans. Quatrième partie, De « Il vit beaucoup de lumières dans le cabinet » à « et de le voir devenir plein de sévérité et de colère ! »

Cet extrait relate l’observation de Madame de Clèves qui se croit seule, par le duc de Nemours et témoigne de l'amour qu'elle éprouve pour le duc de Nemours dans un moment d’intimité lorsque celui-ci s’introduit dans la propriété et la surprend.

Comment la narratrice fait-elle partager au lecteur les sentiments des personnages durant cette scène grâce aux jeux de regards ?

Nous étudierons la description réaliste réalisée par l’auteur, de façon non seulement organisée, mais aussi exhaustive, puis nous essayerons de montrer que cette scène est idéalisée, avec un amant courtois, et leur passion qui est commune. Enfin, nous insisterons sur l’interdit de cet amour, avec le jeu des regards, et la position de voyeur de Monsieur de Nemours mise en évidence.

Dans ce texte, on assiste à une description réaliste de la scène, des personnages, de leurs pensées et de leurs occupations. Cette description est très organisée, elle commence par le décor : “Il vit beaucoup de lumières dans le cabinet ; toutes les fenêtres en étaient ouvertes”, “des palissades”, “des fenêtres, qui servaient de porte”. Puis l’attention du lecteur est dirigée vers Mme de Clèves : “admirable beauté”, “elle n’avait rien, sur sa tête et sur sa gorge, que ses cheveux confusément rattachés” et ce qu’elle fait : “Elle était sur un lit de repos, avec une table devant elle, où il y avait plusieurs corbeilles pleines de rubans”, “avec une grâce et une douceur”, “tableau du siège de Metz, où était le portrait de M. de Nemours”, “avec une attention et une rêverie que la passion seule peut donner”. Enfin, la description est acheminée sur M. de Nemours, le prince : “il demeurait immobile à regarder Mme de Clèves”

De plus, cet aperçu est exhaustif. Il insiste tout au long du texte sur Mme de Clèves : “Il vit qu’elle était seule”, “elle n’avait rien, sur sa tête et sur sa gorge, que ses cheveux confusément rattachés”, et la passion qu’ils se portent réciproquement : “Elle était sur un lit de repos, avec une table devant elle, où il y avait plusieurs corbeilles pleines de rubans ; elle en choisit quelques-uns, [...] des mêmes couleurs qu’il avait portées au tournoi” et “Il vit qu’elle en faisait des nœuds à une canne des Indes, fort extraordinaire, qu’il avait portée quelque temps”. Il semblerait également y avoir une gradation dans les objets l’occupant, tout d’abord les rubans, puis une canne, et enfin un portrait de son amant : “elle prit un flambeau et s’en alla, proche d’une grande table, vis-à-vis du tableau du siège de Metz, où était le portrait de M. de Nemours ; elle s’assit et se mit à regarder ce portrait”. Le flambeau semble être une allégorie de la flamme amoureuse que la princesse éprouve pour le duc. Ainsi, au fil du texte on se rend de plus en plus compte de l’ampleur de ses sentiments envers lui : “On ne peut exprimer ce que sentit M. de Nemours dans ce moment.”, “Voir au milieu de la nuit, [...], une personne qu’il adorait, la voir sans qu’elle sût qu’il la voyait, et la voir tout occupée de choses qui avaient du rapport à lui et à la passion qu’elle lui cachait, c’est ce qui n’a jamais été goûté ni imaginé par nul autre amant.”

Cette scène des rubans dans La Princesse de Clèves est idéalisée par de nombreux procédés dont des figures de style telles que l’hyperbole : « dans le plus beau du monde ». Le prince, M. de Nemours est un amant courtois, c’est-à-dire qu’il se montre respectueux, serviable et protecteur envers la dame qu’il adore.

Il observe discrètement Mme de Clèves depuis “une des fenêtres, qui servaient de porte” pour savoir ce qu’elle fait. Elle est occupée avec des rubans, et, fasciné, il prend soin de remarquer chaque détail : “M. de Nemours remarqua que c’étaient des mêmes couleurs qu’il avait portées au tournoi”. Il est submergé par les émotions ce qui montre que nous sommes dans un roman psychologique : “Ce prince était aussi tellement hors de lui-même qu’il demeurait immobile à regarder Mme de Clèves, sans songer que les moments lui étaient précieux” et désire lui parler. L’auteure utilise une allitération en [t] dans la phrase « toutes les fenêtres en étaient ouvertes » pour y insister. Cependant, par courtoisie, il ne souhaite pas la compromettre par la découverte de sa présence : “Quand il fut un peu remis, il pensa qu’il devait attendre à lui parler qu’elle allât dans le jardin ; il crut qu’il pourrait le faire avec plus de sûreté, parce qu’elle serait plus éloignée de ses femmes ; mais, voyant qu’elle demeurait dans le cabinet, il prit la résolution d’y entrer”. De plus, il craint la réaction de la princesse : “Quand il voulut l’exécuter, quel trouble n’eut-il point ! Quelle crainte de lui déplaire ! Quelle peur de faire changer ce visage où il y avait tant douceur et de le voir devenir plein de sévérité et de colère !”

Au cours de la soirée, M. de Nemours comprend que la passion qu’il ressent envers elle : “une personne qu’il adorait” est réciproque : “la passion qu’elle lui cachait”. L’anaphore de « il vit » insiste sur le bouleversement que cela lui procure : “On ne peut exprimer ce que sentit M. de Nemours dans ce moment” et “il s’en approcha avec un trouble et une émotion qu’il est aisé de se représenter”. De plus, on peut relever une litote de l’amour qui est désigné comme une rêverie “où était le portrait de M. de Nemours ; elle s’assit et se mit à regarder ce portrait avec une attention et une rêverie que la passion seule peut donner”. Le duc est heureux, même s’il doit se contenter de la regarder, son amour est tellement fort que cela lui est déjà merveilleux : “c’est ce qui n’a jamais été goûté ni imaginé par nul autre amant”, “il la vit d’une si admirable beauté qu’à peine fut-il maître du transport que lui donna cette vue”.

La princesse de Clèves a épousé M. de Clèves, par devoir car c’était le de sa mère. C’est un homme respectable et très amoureux d’elle, mais la princesse en aime un autre qui ne lui est pas destiné. On assiste donc à un amour interdit, au cours de cette scène nocturne qui insiste sur le jeu des regards : “Il se rangea derrière une des fenêtres, qui servaient de porte, pour voir ce que faisait Mme de Clèves” . 

On peut relever un champ lexical du regard : “Il vit”, “cette vue”, “remarqua” etc, qui permet de rendre la scène exaltante et mystérieuse : “Il vit beaucoup de lumières dans le cabinet […] et, en se glissant le long des palissades, il s’en approcha avec un trouble et une émotion qu’il est aisé de se représenter.” 

La vue de la femme qu’il aime le rend heureux, et le submerge d’émotions : “Il vit qu’elle était seule ; mais il la vit d’une si admirable beauté qu’à peine fut-il maître du transport que lui donna cette vue”. Il fait d’elle un portrait élogieux : “une grâce et une douceur que répandaient sur son visage les sentiments qu’elle avait dans le cœur”, et l’amour qu’il a vu qu’elle lui porte l’embellit plus encore.

En effet, elle a observé le prince durant le tournois, pour avoir ainsi retenu les couleurs qu’il portait : “M. de Nemours remarqua que c’étaient des mêmes couleurs qu’il avait portées au tournoi”. De plus, elle s’est procurée un objet lui ayant appartenu pour toucher ce qu’il a touché. A l’époque, ce geste est très érotique : “Il vit qu’elle en faisait des nœuds à une canne des Indes, [...], qu’il avait portée quelque temps, à qui Mme de Clèves l’avait prise sans faire semblant de la reconnaître pour avoir été à M.de Nemours”. Le fait de toucher des objets ayant appartenu à l’homme qu’elle aime est un moyen de vivre sa passion par procuration. Enfin, elle s’est débrouillée pour s’approprier un portrait de son amant afin de l’observer en toute intimité : “où était le portrait de M. de Nemours ; elle s’assit et se mit à regarder ce portrait avec une attention et une rêverie que la passion seule peut donner”. La forte émotion ressentie par le duc est notamment témoignée dans les phrases “On ne peut exprimer ce que sentit M. de Nemours dans ce moment”, et “Voir [...] une personne qu’il adorait, la voir sans qu’elle sût qu’il la voyait, et la voir tout occupée de choses qui avaient du rapport à lui et à la passion qu’elle lui cachait, c’est ce qui n’a jamais été goûté ni imaginé par nul autre amant”. Bien qu’il ait tout d’abord besoin de se ressaisir : “Ce prince était aussi tellement hors de lui-même qu’il demeurait immobile à regarder Mme de Clèves, sans songer que les moments lui étaient précieux », le duc souhaite lui parler, et la confronter au sujet de sa découverte sur l’amour qu’elle lui porte : “quand il fut un peu remis, il pensa qu’il devait attendre à lui parler qu’elle allât dans le jardin ; il crut qu’il pourrait le faire avec plus de sûreté, parce qu’elle serait plus éloignée de ses femmes ; mais, voyant qu’elle demeurait dans le cabinet, il prit la résolution d’y entrer”. Cependant, il est terrifié à l’idée de lui déplaire : “Quand il voulut l’exécuter, quel trouble n’eut-il point ! Quelle crainte de lui déplaire ! Quelle peur de faire changer ce visage où il y avait tant douceur et de le voir devenir plein de sévérité et de colère !”

La position de voyeur de Monsieur de Nemours : “Ce prince était aussi tellement hors de lui-même qu’il demeurait immobile à regarder Mme de Clèves, sans songer que les moments lui étaient précieux” qui observe Mme de Clèves dans un moment d’intimité, dans sa chambre : “Il vit beaucoup de lumières dans le cabinet”, puis : “Il se rangea derrière une des fenêtres, qui servaient de porte, pour voir ce que faisait Mme de Clèves” montre à quel point il l’aime. Il lui suffit de la voir pour être heureux : “Il vit qu’elle en faisait des nœuds à une canne des Indes, [...], qu’il avait portée quelque temps” et “voir [...] une personne qu’il adorait, la voir sans qu’elle sût qu’il la voyait, et la voir tout occupée de choses qui avaient du rapport à lui et à la passion qu’elle lui cachait, c’est ce qui n’a jamais été goûté ni imaginé par nul autre amant”.

De plus, elle n’est pas avertie de sa présence, les sentiments qu’elle dévoile sur son visage sont donc purs et honnêtes : “Il vit qu’elle était seule ; mais il la vit d’une si admirable beauté qu’à peine fut-il maître du transport que lui donna cette vue”. C’est très érotique à l’époque, tout comme sa coiffure négligée : “elle n’avait rien, sur sa tête et sur sa gorge, que ses cheveux confusément rattachés.” 

Le réalisme réfléchi et organisé de la description fait de ce roman une œuvre psycologique qui non seulement permet de visualiser la scène, mais aussi de connaître les pensées des personnages. L’auteur idéalise la relation des deux amoureux qui est pourtant platonique, distante et triste, bien que tous deux se contentent de ce qu’ils ont (un portrait, des regards etc). L’amant est également idéalisé, en tant que chevalier courtois comme au Moyen-Âge qui l’observe dans un moment intime et ne se décide pas à se montrer. Au final, il ne franchit pas le pas, et la relation ne se concrétise pas malgré l’amour dévoilé de Mme de Clèves envers lui.

La dernière entrevue entre la Princesse de Clèves et le Duc de Nemours. Quatrième partie, De «Par vanité ou par goût, toutes les femmes souhaitent de vous attacher» à «Pourquoi la destinée nous sépare-t-elle par un obstacle si invincible ?»

Dans "La Princesse de Clèves" de Madame de La Fayette, le passage examiné met en lumière la dernière entrevue entre Madame de Clèves et le Duc de Nemours, illustrant la lutte intérieure de l'héroïne entre la passion et la raison. Cette scène capitale du roman nous offre un éclairage sur les conventions sociales et les dilemmes moraux de l'époque.

 

I) Un dialogue argumenté

 

a) Arguments de M. de Nemours

 

Le Duc de Nemours, personnage emblématique du courtisan idéal, argumente en faveur de la force irrésistible de l'amour, mettant en avant l’idée que les sentiments sincères surpassent les contraintes sociales et morales.

 

b) Arguments de Madame de Clèves

 

Madame de Clèves, quant à elle, fait preuve d'une réflexion profonde sur le devoir et l'honneur, soulignant l'importance de rester fidèle à la mémoire de son mari défunt et de respecter les conventions sociales et morales de son temps.

 

II) Une scène pathétique

 

a) La théâtralité de la scène

 

La scène est marquée par une forte théâtralité, où les gestes et les paroles des personnages sont chargés d'émotion. Le désespoir et la passion du Duc de Nemours contrastent avec la retenue et le calme apparent de Madame de Clèves, soulignant la tension dramatique.

 

b) Le pathétique de la situation

 

La situation est empreinte de pathos, avec des éléments tels que les larmes et les soupirs, qui mettent en relief la douleur et le dilemme moral vécu par Madame de Clèves. Cela souligne la tragédie de l'amour impossible et de la renonciation.

 

III) Madame de Clèves, une héroïne sublime

 

a) Culpabilité et tragique

 

Madame de Clèves est tiraillée entre la culpabilité et le sentiment tragique de sa situation. Elle est consciente du malheur qu'elle inflige à Nemours et à elle-même, mais reste résolue à suivre la voie de la vertu et du devoir.

 

b) Le renoncement à la passion

 

La décision de Madame de Clèves de renoncer à sa passion pour le Duc de Nemours illustre sa grandeur d'âme et sa force de caractère. Elle incarne l'idéal de vertu et de maîtrise de soi, qui est loué dans la société de l'époque.

 

En conclusion, cette scène finale entre Madame de Clèves et le Duc de Nemours met en lumière la complexité des émotions humaines et la lutte entre la passion et la raison. Madame de La Fayette, à travers son roman, dépeint avec finesse les conflits intérieurs de ses personnages, offrant un aperçu des conventions sociales et des valeurs morales du XVIIe siècle.

Etude Linéaire du dénouement

 

INTRODUCTION

Madame de la Fayette dans son siècle : petite noblesse. Siècle de Louis XIV et du classicisme (règles). Raffinement de

sentiments, exaltation de la femme, « galanterie » amoureuse. La princesse de Clèves dans l’œuvre de Mme de

Lafayette : publiée en 1678. L’action se passe vers 1550 – 1560. Son œuvre la plus célèbre. Énorme succès, mais aussi

nombreuses controverses. Œuvre qui fonde le roman moderne jusqu’au XXème siècle. L’extrait dans l’œuvre : Mme de

Clèves est aimée de son mari, mais elle n’a pour lui que de l’estime. Elle vit au contraire une passion partagée avec le duc

de Nemours, tout en restant fidèle à son mari. Ce dernier vient de mourir, se croyant trompé par sa femme. Fin du

roman, Mme de Clèves a enfin une conversation franche et directe avec Nemours

LECTURE

Problématiques possibles :

En quoi ce dénouement est-il tragique ? / Comment est vécu ici le conflit de la raison et des passions ? / Qu’est-ce qui rend ce dénouement surprenant ?

Annonce du plan :

I. Lignes 1 à 16 : la passion amoureuse indissociable du malheur

II. Lignes 17 à 28 : des obstacles précieux.

III. Lignes 29 à la fin : le renoncement tragique

 

I. La passion amoureuse indissociable du malheur

« Je crois devoir » LPC se sent redevable vis-à-vis du duc de Nemours. Sa récompense

sera sincérité et franchise “faible récompense” : hommage rendu à l’intensité de la

passion que le duc éprouve pour elle. C’est à la fois une scène de refus et un aveu de sa

part.

« laisser voir » Registre argumentatif : LPC justifie sa décision. Tirade théâtrale qui fait

penser à un dénouement de tragédie : Nemours et le lecteur s’attendaient à une fin

heureuse.

« la seule fois » caractère exceptionnel de la révélation. “Apparemment” : sens de la

mesure, ne jure de rien sur l’avenir. Personnage héroïque : tout le roman jusqu’à cette

page, nous l’a montrée comme une femme admirable par la beauté, la naissance, la

vertu, le courage et toutes les grandes vertus morales.

« néanmoins » + « raisons » donnent à ses propos une dimension logique et rationnelle

qui s’ajoute à l’entreprise de sincérité qu’elle a enclenchée au début de la conversation.

LPC révèle ses sentiments et avoue son amour mais aussi ses craintes. Elle se contraint

et fait effort pour cacher ses sentiments avec un vocabulaire privatif.

Elle développe son argumentation qui justifie qu’elle refuse d’épouser Nemours.

ARGUMENT 1 : si votre amour diminue je serai malheureuse. Le terme « malheur »

employé à deux reprises avec l’adverbe intensif « si » souligne la difficulté de dire,

d’avouer son amour autant qu’elle met en avant sa souffrance.

OBJECTION 1 : il est vrai que nous pouvons nous marier « pour jamais » dans le respect

de la bienséance « public ; blâmer ». Elle sait que personne n’aurait rien à redire

concernant leur union mais craint que la passion de son mari ne se dissipe au cours du

temps. Le terme « public » fait référence à la cour. L’utilisation de « ni moi non plus »

insiste sur la réalisation possible de ce mariage et laisse le Duc de Nemours espérer une

fin positive et heureuse.

ARGUMENT 2 : la conjonction de coordination adversative « mais » met fin à tout

espérance et laisse d’emblée envisager les réticences à venir. Un homme marié ne

reste pas amoureux. Argument renforcé par des questions rhétoriques sur la passion

éphémère des hommes. Recherche de l’assentiment de l’auditeur / lecteur et

formulation du cheminement de sa pensée.

Le terme « miracle » prouve que sa naïveté a cessé et qu’elle est à présent au courant

des méfaits masculins. Il ne faut pas oublier que ce roman a été écrit par une femme,

on peut supposer qu’elle donne son point de vue sur la gente masculine à travers la

princesse de Clèves.

Apothéose de M. de Clèves par l’emploi d’hyperboles. La Princesse répond à ses

propres interrogations en faisant du prince de Clèves l’exception à la règle. L’adjectif

“unique” souligne la place importante qu’elle accorde à son défunt mari. Elle se

réconforte ensuite en faisant intervenir sa «destinée». Le verbe «voulu» a bien pour

sujet la destinée et non la princesse ce qui renforce le fait qu’elle n’y est pour rien dans sa mort.

Tragique de la « destinée » : personnage héroïque qui, pour aller contre la fatalité, a

affronté des forces qui ont fini par l’écraser : la passion amoureuse.

Incompatibilité mariage / passion / bonheur.

ARGUMENT 3 : L’amour de M. de Clèves et de Nemours sont restés puissants grâce aux

obstacles qu’ils ont rencontrés. L’amour lui-même si passionné soit-il est condamné à

s’affaiblir dans le mariage. Les hommes surtout sont poussés à changer d’objet

d’amour, une fois mariés.

Ce n’est plus le lexique de l’amour, comme c’était le cas pour Monsieur de Clèves, mais

celui de la conquête, de la guerre : «vaincre », « moyens », « actions”, « obstacles ». Ici

l’amour est perçu sur le mode de la possession de l’autre. Ce qui lui donne une

dimension assez péjorative.

Elle explique ainsi l’attachement du Duc de Nemours, non pour elle-même mais plutôt

pour la série d’obstacles qu’elle a mis volontairement ou non sur son chemin et qui

l'ont attaché à elle. En d’autres termes, ce ne sont que par des faits matériels stimulant

un désir de conquête que Nemours s’est ainsi épris de sa personne.

Aussi, on retrouve dans ce passage une sorte de phénomène de bilan, qui est mené sur

la narration dont certaines expressions générales, peuvent évoquer en écho au lecteur

des faits particuliers comme celui du vol du portrait auquel on pense lorsque la

princesse évoque : « les actions involontaires ».

 

II. Les tourments de la jalousie

LPC totalement maîtresse jusqu’à présent, puisque depuis le début de l’analyse aucune

parole avant celle-ci n’a encore été rapporté directement par le Duc de Nemours.

Seule intervention de Nemours dans la tirade de LPC et qui marque la deuxième partie de son raisonnement. Il lui reproche son inconséquence avec force « trop », « combien »

adverbes d’intensité + quantité : vous dites que vous m’aimez et vous me rejetez. Hyperbole pour convaincre. Veut susciter la pitié.

ARGUMENT 4 : vous êtes si parfait que je souffrirai forcément de la jalousie.

Emploi du conditionnel + négation = valeur hypothétique annulée par la négation, marque la force de la décision de LPC. La raison garde les commandes. L’amour qui rend aveugle laisse LPC envisager l’avenir avec lucidité.

Présent de vérité générale “j’avoue ; peuvent” = véritable maxime du roman, qui n’est pas sans rappeler en écho l’éducation qu’a reçue la princesse par sa mère. Il y a dans ces propos une grande lucidité qui prouve le chemin parcouru par la princesse et le stade auquel elle est arrivée.

Éloge des qualités de Nemours qui le rendent si séducteur. Rappel des codes du roman

précieux : doté de toutes les qualités lui permettant de déjouer tous les obstacles pour

parvenir à ses fins.

portrait de Nemours en séducteur présent de vérité générale qui montre que le portrait de Nemours est sans appel :

La position du pronom indéfini "rien" souligne la volonté de la princesse de tout analyser.

Le duc est caractérisé par ses "dispositions pour la galanterie" et "ses succès heureux". Or ces expressions peuvent avoir un double sens : la galanterie est un art de vivre mais aussi un vice (cf l'incipit du roman qui trace un tableau à la fois admiratif et sombre de la cour des Valois), de plus le pluriel témoigne de l'aspect répétitif des liaisons (au sens du XVIIème de commerce amoureux).

Amour // Guerre. Les hommes à la cour mettent dans la conquête amoureuse la même

énergie que dans la conquête guerrière. Un terrain conquis une fois découvert suscite donc systématiquement le désir d’un nouveau.

Danger mortel de jalousie (hyperbole => fatalité). Le mariage ou la rupture mèneront

inévitablement LPC à la mort, mais la rupture dans la dignité et le respect de la mémoire de son mari.

Le champ lexical du malheur finit d’achever l’extrait en donnant une coloration tragique au roman et inscrivant par la même occasion le personnage de la princesse au rang d’héroïne tragique.

Lutte contre la jalousie : emploi du superlatif + périphrase « le plus grand de tous les maux » => les douleurs mortelles auxquelles conduit l’amour : hyperbole « une douleur mortelle », « de si cruelles peines », ainsi que dans le superlatif : « le plus grand de tous les maux » : c’est ainsi de son éventuelle jalousie, et donc d’elle-même dont la princesse se défie le plus.

La jalousie est le dernier argument qui finit de lui confirmer son renoncement à l’amour.

Cette jalousie est associée à une sorte de maladie terrible qui transforme les hommes, les rend monstrueux et dont il faut se méfier. L’épisode de la lettre sert de nouvel exemple à l’argument, il est de nouveau dramatisé dans la stratégie argumentative. Elle rappelle les conditions de la scène en reconvoquant les acteurs de l’épisode : « Madame de Thémines », mais aussi le contexte temporel : « le soir», qui a valeur symbolique de caractériser un moment terriblement sombre dans ce parcours tortueux de l’amour. L’emploi des passés simples et des verbes d’actions permettent de retracer avec fulgurance l’enchaînement fatal des épisodes et de lui donner une dimension tragique. Ce souvenir peut ainsi être lu comme un véritable cauchemar.

 

III. Le renoncement tragique :

Fatalité LPC ne peut lutter pour conserver l’amour d’un homme tant désiré. Gradation « peu » « point ». Enfin le risque de jalousie est exprimé par l'effet inévitable que produit Nemours sur la gente féminine dans l’emploi de la négation partielle, "il y en a peu à qui vous ne plaisiez". Mise en avant des qualités de l'être aimé qui seront source de souffrance pour l'amante.

ARGUMENT 5 : Mariée, je ne pourrai même pas me plaindre « je ne sais

même si j’oserais ». "Je vous croirais toujours amoureux et aimé et je ne me tromperais pas souvent." La litote tend à montrer que le tableau des infidélités qu'elle

dresse se réalisera.

Emploi du verbe “croire” : Souvent Mme de Clèves mélange deux espaces : la réalité et le fantasme.

Une longue tirade est écrite au conditionnel, ce qui traduit la peur irrationnelle de l'abandon.

« amant – mari – amour » : l’être humain est partagé entre la raison et les passions au XVIIème siècle. Conflit qui doit se résoudre par une rupture. Même cette femme parfaite est destinée à souffrir de l’amour : soit elle épouse Nemours et elle souffre de la jalousie ; soit elle ne l’épouse pas et elle souffre de la rupture.

ARGUMENT 6 : Le souvenir de M. de Clèves me ferait sentir coupable d’avoir épousé son meurtrier, et d’avoir choisi un amour inférieur au sien.

CONCLUSION : J’ai donc décidé (raison, volonté) de ne pas me marier.

Ce raisonnement illustre bien le pouvoir de la raison sur les passions.

Dénouement ambigu qui fait débat : la raison doit-elle l’emporter toujours sur les passions ? Même au prix du bonheur ? La peur de souffrir justifie-t-elle qu’on renonce à l’amour ?

 

CONCLUSION : La princesse est parvenue à garder le contrôle de ses passions, mais elle n’y gagne rien : l’amour est voué à l’échec, dans tous les cas.

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