Le joueur d'échecs de Stefan Zweig Analyse de l'oeuvre intégrale
I) Incipit
1) Les caractéristiques de l’incipit
Nous avons quelques informations concernant le cadre spatio-temporel, nous savons que l'action se passe à bord d’un paquebot qui part de New York pour aller à Buenos Aires au moment de l’embarquement.
La description du pont décrit l’atmosphère très agitée, il y des passagers partout, des journalistes qui courent et des musiciens : “effervescence”.
Le point de vue utilisé est un point de vue interne.
2) Une description réaliste
Stefan Zweig a pu connaître les détails d’une croisière de ce genre car il a certainement dû en faire.
Il donne l’impression que Czentovic existe réellement en disant que l’on parle de lui dans les journaux : “mon ami lecteur de journaux plus attentif que moi put les compléter par une longue série d’anecdotes.”
Le sens le plus présent dans cet extrait est celui de la vue car le champ lexical du regard est omniprésent : “Mon ami regarda dans leur direction”, “il dû voir”, “photographier”.
3) Le lancement du récit
Ce sont les journalistes qui, au départ, attirent l’attention du lecteur : “des reporters avaient réussi à interviewer des célébrités” puis c’est l’ami du narrateur qui dit ; “Vous avez à bord un oiseau rare, le fameux Czentovic.”
Le temps utilisé est le plus que parfait, il a un aspect accompli car il définit une action révolue et bornée dans le passé.
Les éléments qui rendent Czentovic intéressant est le fait qu’il soit célèbre, c’est “le champion du monde d'échec", c’est une star tous les journalistes lui courent après : ( “Quand deux ou trois flashs crépitèrent”).
II) L’intervention
1) La passion du jeu
Dans un premier temps, la partie oppose Czentovic au narrateur et à ses amis, puis monsieur B intervient. Les participants sont passionnés : “McConnor fixait l’échiquier comme si sa volonté de gagner allait magnétiser les pièces”. Le narrateur emploie le pronom “nous” parce qu’ils sont plusieurs à réfléchir ensemble pour tenter de battre le champion du monde.
2) Le piège et le sauveur
Czentovic les laisse en position de faire une dame pour mieux les prendre à revers car ce n’est qu’un appât. Monsieur B utilise le mot “piège” pour parler de cette tactique.
Monsieur B apparaît comme un sauveur : “Un monsieur d’environ quarante-cinq ans, dont le visage en lame de couteau m’avait déjà frappé sur le pont-promenade.”
L’arrivée du sauveur est préparée dès le début du passage : “cette chance trop manifeste nous inquiétait un peu ; nous soupçonnions unanimement que cet apparent avantage était un hameçon auquel voulait nous faire mordre Czentovic qui, lui, voyait beaucoup plus loin”.
3) L’homme providentiel
Le narrateur garde le mystère sur l’homme qui intervient en le faisant arriver derrière McConnor à qui il touche le bras sans qu’il le voie, et en lui chuchotant à l’oreille.
Le champ lexical du surnaturel donne à monsieur B l’apparence d’une puissance magique : “sa soudaine intervention, en un moment si critique, avait quelque chose de presque surnaturel”.
III) La barbarie nazie
1) L’isolement
Le personnage n’a plus de repères dans le temps en effet, il ne sait même plus s’il fait jour ou nuit: “sans bien savoir si c’était le jour ou la nuit”, il est enfermé dans une pièce sans fenêtre, on lui a confisqué sa montre, il n’y a pas d’horloge sur les murs, pas de calendrier ; ceci s'apparente à de la torture car cela dérègle complètement son horloge interne et de plus tous les êtres vivants ont besoin de soleil pour vivre. De plus les murs ont tous le même motif géométrique qui se répète à l’infini et cela devient obsédant : "j'avais toujours sous les yeux le même papier peint sur les mêmes murs, chaque ligne de son motif en dent de scie est gravée comme au burin dans les replis de mon cerveau.” Les mots : “rien”, “sombre” et “seul” sont répétés à plusieurs reprises, ce qui donne au lecteur un sentiment d’enfermement, d'oppression, de solitude. Cela va pousser monsieur B à devenir schizophrène, car ne trouvant rien à l’extérieur de lui, il va progressivement rentrer en lui-même et jouer mentalement contre lui-même aux échecs dans sa tête.
2) La dénonciation du nazisme
L’indication qui permet de situer l’époque de cette période est “la Gestapo” ce qui nous laisse penser que ceci se passe durant la seconde guerre mondiale.
Les nazis sont présentés comme des tortionnaires qui refusent toute communication, ils ont pour ordres de ne pas parler aux prisonniers dans le but de les isoler avec leurs pensées obsédantes jusqu’à leur faire perdre la raison.
3) “En face à face avec soi même”
Le narrateur de ce passage n’est pas le même que celui qui rapporte l’histoire au début de la nouvelle, en effet, c’est Monsieur.B qui raconte ce passage. Monsieur.B raconte son récit au premier narrateur, ce procédé s’appelle un récit enchâssé.
Les différentes métaphores employées par le narrateur sont : “comme un plongeur sous sa cloche de verre”, “Dans une chambre hermétiquement coupée du monde”.
L’emploi répétitif du pronom personnel “on” à la place de “je” souligne le fait que les prisonniers, isolés et privés de l’usage du langage, sont déshumanisés et traités comme un groupe indistinct.
IV) La clôture du texte
1) Le spectacle
Le sens le plus sollicité dans ce passage est celui de la vue car tout le monde est en train de fixer l'échiquier. Le public n’intervient pas dans la partie car ils ne comprennent pas la réaction de M.B qui leur semble fou.
2) Les attitudes des deux adversaires s’opposent, en effet, Czentovic reste très calme car c’est un véritable joueur d’échecs qui sait donc rester maître de ses émotions en toutes circonstances, même s’il doit certainement être agacé et vexé par le comportement déplacé de son adversaire : "Czentovic resta muet et baissa sa tête” ; “et alors jeta seulement jeta à la cantonade, d’un ton de politesse affectée : “je regrette … mais je ne vois pas d’échec contre mon roi. L’un de ces messieurs voit-il un échec contre mon roi?”
3) L’intervention du narrateur
M.B se trompe car le fait de jouer aux échecs réveille sa schizophrénie, comme un ancien alcoolique qui ne doit plus jamais toucher à l’alcool, le médecin lui avait dit de ne plus jamais jouer aux échecs. Et donc de toute évidence monsieur B est en train de jouer une autre partie dans sa tête pendant qu’il joue la partie réelle contre Czentovic et à un moment il confond les deux parties.
Le narrateur lui touche la main pour ramener monsieur B à la réalité par une sensation physique. En effet, lorsqu’il était prisonnier, monsieur B. s’est complètement isolé dans son esprit, oubliant totalement son corps devenu inutile.
Il existe un lien particulier entre le narrateur et monsieur B car il lui a raconté son histoire et le narrateur l’avait averti que ce serait une mauvaise idée de rejouer aux échecs. Le narrateur à été particulièrement touché par la confidence et la confiance que monsieur B lui à accordées et donc il voulait le protéger de lui même.
4) Une partie symbolique
Czentovic est associé au roi car il est le maître de l'échiquier et surtout il est maître de soi-même contrairement à monsieur B qui est certainement plus intelligent et plus doué aux échecs que Czentovic mais qui n’est pas du tout maître de soi-même : “Il me jeta un regard de somnambule", "son oeil vitreux”.
Czentovic a le mot de la fin, ce qui démontre son impassibilité. Même face à un fou, il demeure imperturbable.
Écrire commentaire
non (vendredi, 01 juillet 2022 23:42)
pessi
SOLEDAD (samedi, 25 février 2023 15:40)
AVOIR ACCES POUR COPIER
CHAMPION (mercredi, 26 avril 2023 21:30)
Merci pour cette analyse très pertinente et intéressante
Merci de prendre votre temps afin de nous publier une telle chose comme cela
Merci beaucoup