Lecture analytique de La Fontaine, Le singe et le Léopard

Lecture analytique de La Fontaine, Le singe et le Léopard

Le cadre du récit est très vite posé. L’imparfait de l’indicatif itératif indique que les mêmes actions se répètent de façon régulière.

La plus grande qualité du léopard est la beauté de sa fourrure, donc c’est une critique des courtisans qui misent tout sur leurs vêtements pour plaire au roi, mais la mode est éphémère donc leur position est précaire. Humour de La Fontaine par rapport au léopard qui se réjouit que le roi “veuille sa peau” pour s’en faire un manteau de fourrure, situation inquiétante pour le léopard.

Les alexandrins 10 et 11 sont césurés à l’hémistiche (coupés au milieu) ce qui donne un rythme binaire qui souligne le rapport cause-conséquence : “La bigarrure plaît ; partant chacun le vit” (il y en a un qui dit que le léopard est beau et à partir de là tout le monde le regarde), “Mais ce fut bientôt fait, bientôt chacun sortit” (mais ils ont vite fait de regarder et très rapidement ça ne les intéresse plus, ils passent à autre chose, ils cherchent une autre distraction).

Le singe veut tout de suite récupérer l’attention et fait sa pub : “Venez, Messieurs. Je fais cent tours de passe-passe”. Le singe parle beaucoup plus longtemps que le léopard, il argumente pour convaincre son public et ça démontre une plus grande intelligence chez le singe (malin comme un singe) que chez le léopard. Le singe ancre son discours dans le réel en évoquant des noms propres connus de son public. Son dernier argument “satisfait ou remboursé” sécurise le public déjà tout acquis à son discours qui était bien ficelé.

Au vers 26 La Fontaine prend directement la parole pour énoncer la morale et appuyer son propre point qui est que la beauté lasse vite alors que l’intelligence et l’humour (avoir de l’esprit) renouvelle sans cesse le plaisir. On peut y voir une dimension autobiographique à l’infidélité conjugale de La Fontaine qui, bien que marié à une femme très belle, allait sans cesse en séduire d’autres.

La moralité est soutenue par les alexandrins césurés à l’hémistiche car le rythme binaire donne un équilibre à sa pensée.

On peut parler ici d’une double moralité : d’un côté il se moque des courtisans prêts à tout pour attirer l’attention ce qui les rend ridicules ; d’un autre côté, il affirme la supériorité de l’esprit sur les apparences pour construire les relations humaines.

 

On peut parler dans cette fable d’un art poétique de La Fontaine qui privilégie toujours la gaieté et la variété dans ses fables afin de garder l’attention du lecteur pour que celui-ci retienne mieux le message qu’il veut faire passer. 

Dans Le singe et le léopard, la gaieté vient à la fois de l’histoire amusante qui est racontée mais surtout des changements de rythme provoqués par 

l’hétérométrie (des vers de longueurs différentes), 

les enjambements, 

les césures, 

l’alternance entre le récit et le discours direct, 

la prise de parole de La Fontaine à la fin de la fable, 

les allitérations en [s] et en [r] qui sont désagréables et donc qui attirent l’attention.

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