Commentaire composé sur l'article Paix de Damilaville dans l'Encyclopédie

Texte
DAMILAVILLE : ENCYCLOPEDIE : ARTICLE "PAIX"
La guerre est un fruit de la dépravation des hommes; c'est une maladie convulsive et violente du corps politique; il n'est en santé, c'est-à-dire dans son état naturel, que lorsqu'il jouit de la paix; c'est elle qui donne de la vigueur aux empires; elle maintient l'ordre parmi les citoyens; elle laisse aux lois la force qui leur est nécessaire; elle favorise la population, l'agriculture et le commerce; en un mot, elle procure au peuple le bonheur qui est le but de toute société. La guerre, au contraire, dépeuple les Etats; elle y fait régner le désordre; les lois sont forcées de se taire à la vue de la licence qu'elle introduit; elle rend incertaine la liberté et la propriété des citoyens; elle trouble et fait négliger le commerce; les terres deviennent incultes et abandonnées. Jamais les triomphes les plus éclatants ne peuvent dédommager une nation de la perte d'une multitude de ses membres que la guerre sacrifie; ses victoires même lui font des plaies profondes que la paix seule peut guérir.
Si la raison gouvernait les hommes, si elle avait sur les chefs des nations l'empire qui lui est dû, on ne les verrait point se livrer inconsidérément aux fureurs de la guerre; ils ne
marqueraient point cet acharnement qui caractérise les bêtes féroces. Attentifs à conserver une tranquillité de qui dépend leur bonheur, ils ne saisiraient point toutes les occasions de troubler
celle des autres; satisfaits des biens que la nature a distribués à tous ses enfants, ils ne regarderaient point avec envie ceux qu'elle a accordés à d'autres peuples; les souverains sentiraient
que des conquêtes payées du sang de leurs sujets ne valent jamais le prix qu'elles ont coûté. Mais, par une fatalité déplorable, les nations vivent entre elles dans une défiance réciproque;
perpétuellement occupées à repousser les entreprises injustes des autres ou à en former elles-mêmes, les prétextes les plus frivoles leur mettent les armes à la main. Et l'on croirait qu'elles
ont une volonté permanente de se priver des avantages que la Providence ou l'industrie leur ont procurés. Les passions aveugles des princes les portent à étendre les bornes de leurs Etats; peu
occupés du bien de leurs sujets, ils ne cherchent qu'à grossir le nombre des hommes qu'ils rendent malheureux. Ces passions, allumées ou entretenues par des ministres ambitieux ou par des
guerriers dont la profession est incompatible avec le repos, ont eu, dans tous les âges, les effets les plus funestes pour l'humanité. L'histoire ne nous fournit que des exemples de paix violées,
de guerres injustes et cruelles, de champs dévastés, de villes réduites en cendres. L'épuisement seul semble forcer les princes à la paix; ils s'aperçoivent toujours trop tard que le sang du
citoyen s'est mêlé à celui de l'ennemi; ce carnage inutile n'a servi qu'à cimenter l'édifice chimérique de la gloire du conquérant et de ses guerriers turbulents; le bonheur de ses peuples est la
première victime qui est immolée à son caprice ou aux vues intéressées de ses courtisans.
Commentaire composé
Cet article d’encyclopédie en est-il vraiment un ?
I) La dénonciation de la guerre
Dans cet article, Damilaville fait une dénonciation de la guerre. Un article d'encyclopédie est supposé donner une définition simple du sujet sans donner son avis, mais ici, l’auteur fait une critique de la guerre pour définir la paix. Tout d’abord, il introduit sa définition au moyen d’une métaphore filée de la maladie, décrivant la guerre comme une “maladie convulsive” et “violente du corps politique”. L’auteur utilise de nombreuses énumérations afin de dénoncer la guerre et de faire l'éloge de la paix : “La guerre, au contraire, [...] trouble et fait négliger le commerce; les terres deviennent incultes et abandonnées.”, “les triomphes les plus éclatants [...] font des plaies profondes que la paix seule peut guérir.” On retrouve le champ lexical de la férocité dans le texte, qui insiste sur les horreurs de la guerre: “fureurs de la guerre”, “ils ne marqueraient point cet acharnement qui caractérise les bêtes féroces.” Damilaville a mis au point une stratégie argumentative pour convaincre son lecteur dans un texte qui veut se faire passer pour un article d’encyclopédie.
II) La stratégie argumentative
Il commence son article en donnant une définition de la guerre alors qu’il s’intitule “paix”. En dénonçant le mauvais de la guerre, l’auteur donne une définition de la paix en négatif, sans l’avoir pratiquement citée. Tous les arguments qu’il donne à l’encontre de la guerre sont là pour faire l’éloge de la paix. Dans cette citation : “Ces passions, [...] dont la profession est incompatible avec le repos, ont eu,[...] les effets les plus funestes pour l'humanité”, l’auteur démontre en fait que la paix pourrait stabiliser notre société. De plus, Damilaville, grâce à l’emploi du conditionnel, montre au lecteur ce que le monde serait sans la guerre ; il fait appel à son imagination, ce qui n’est pas l’usage dans un article d'encyclopédie. Damilaville utilise de nombreux exemples afin de frapper l’esprit du lecteur : “les triomphes les plus éclatants [...] font des plaies profondes que la paix seule peut guérir.” Dans cet article d'encyclopédie, l’auteur, Damilaville, convainc son lecteur au moyen d’une habile argumentation, à la fois directe et indirecte.
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