Commentaire composé sur "la non demande en mariage" de Georges Brassens

Texte
Ma mie, de grâce, ne mettons
Pas sous la gorge à Cupidon
Sa propre flèche
Tant d'amoureux l'ont essayé
Qui, de leur bonheur, ont payé
Ce sacrilège...
J'ai l'honneur de ne pas te demander ta main
Ne gravons pas nos noms au bas d'un parchemin
Laissons le champ libre à l'oiseau
Nous serons tous les deux priso-
Nniers sur parole
Au diable les maîtresses queux
Qui attachent les cœurs aux queues
Des casseroles!
J'ai l'honneur de ne pas te demander ta main
Ne gravons pas nos noms au bas d'un parchemin
Vénus se fait vielle souvent
Elle perd son latin devant
La lèchefrite
A aucun prix, moi je ne veux
Effeuiller dans le pot-au-feu
La marguerite
J'ai l'honneur de ne pas te demander ta main
Ne gravons pas nos noms au bas d'un parchemin
On leur ôte bien des attraits
En dévoilant trop les secrets
De Mélusine
L'encre des billets doux pâlit
Vite entre les feuillets des li-
Vres de cuisine.
J'ai l'honneur de ne pas te demander ta main
Ne gravons pas nos noms au bas d'un parchemin
Il peut sembler de tout repos
De mettre à l'ombre, au fond d'un pot
De confiture
La jolie pomme défendue
Mais elle est cuite, elle a perdu
Son goût "nature"
J'ai l'honneur de ne pas te demander ta main
Ne gravons pas nos noms au bas d'un parchemin
De servante n'ai pas besoin
Et du ménage et de ses soins
Je te dispense
Qu'en éternelle fiancée
A la dame de mes pensées
Toujours je pense
J'ai l'honneur de ne pas te demander ta main
Ne gravons pas nos noms au bas d'un parchemin
Paroles de La non demande en mariage - Georges Brassens
Commentaire composé
I Une déclaration d’amour paradoxale
“J'ai l'honneur de ne pas te demander ta main
Ne gravons pas nos noms au bas d'un parchemin”: Ici, les phrases traditionnelles de la demande en mariage sont énoncées de façon négative. Cette formulation est surprenante car on comprend que c’est une déclaration d’amour mais qui refuse toutes les conventions sociales.
La métaphore entre l’oiseau et l’amour : “Laissons le champ libre à l'oiseau” exprime la nécessité de ne pas établir de règles dans l’amour.
“A aucun prix, moi je ne veux
Effeuiller dans le pot-au-feu
La marguerite” : L’humour présent dans ce passage permet d’exprimer son refus de laisser sa bien-aimée faire la cuisine, ce qui empêcherait le désir: “On leur ôte bien des attraits en dévoilant trop les secrets de Mélusine”.
“Il peut sembler de tout repos
De mettre à l'ombre, au fond d'un pot
De confiture
La jolie pomme défendue
Mais elle est cuite, elle a perdu
Son goût "nature"”: Le poète a une vision très érotisée de l’amour, il pense que l’entretien est très important.
“Qu'en éternelle fiancée
A la dame de mes pensées
Toujours je pense”: Le poète fait très clairement une déclaration d’amour éternel à sa bien-aimée. La fiancée est valorisée par rapport à la femme car elle n’a pas perdu ses charmes et mérite sans cesse qu’on la courtise puisqu’elle n’est pas acquise : “Ne gravons pas nos noms au bas d'un parchemin”.
II Une vision pessimiste du mariage
“Ma mie, de grâce, ne mettons
Pas sous la gorge à Cupidon
Sa propre flèche
Tant d'amoureux l'ont essayé
Qui, de leur bonheur, ont payé
Ce sacrilège…”: Le poète nous présente ici sa vision pessimiste du mariage avec humour, lorsqu’il reprend le thème du coup de foudre en le désacralisant: “ne mettons pas sous la gorge à Cupidon sa propre flèche”, il utilise le champ lexical du sacré: “Cupidon”, “sacrilège”, “de grâce” afin de montrer que le mariage est le meilleur moyen de tuer l’amour et qu’il faut donc désacraliser le mariage pour sauver l’amour qui lui est sacré.
“J'ai l'honneur de ne pas te demander ta main
Ne gravons pas nos noms au bas d'un parchemin”: On comprend que le poète considère le mariage comme une entrave, avec le mot “gravé”, comme sur un tombeau.
“Au diable les maîtresses queux
Qui attachent les cœurs aux queues
Des casseroles!”: Du moment où l’on se marie, le poète pense qu’il n’y a plus de passion.
“Vénus se fait vielle souvent
Elle perd son latin devant
La lèchefrite” : Pour le poète, les femmes qui cuisinent ne sont pas sexy.
III Une critique de la bourgeoisie
Laissons le champ libre à l'oiseau
Nous serons tous les deux priso-
Nniers sur parole
Au diable les maîtresses queux
Qui attachent les cœurs aux queues
Des casseroles! : Le mariage est perçu comme une prison pour la femme qui se retrouve enchaînée derrières ses fourneaux, qui se laisse aller et n’entretient plus le désir, “L'encre des billets doux pâlit
Vite entre les feuillets des li-
Vres de cuisine.”
“De servante n'ai pas besoin
Et du ménage et de ses soins
Je te dispense”: La femme mariée est considérée comme une servante soumise à son mari. C’est une situation que le poète trouve révoltante, il adresse un message aux femmes de ne plus accepter ça et aux hommes de ne plus le faire subir à leurs épouses. On dirait presque que les hommes s’achètent une femme de ménage grâce au mariage : “Ne gravons pas nos noms au bas d'un parchemin”.
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